Syrie : accord Russie-Turquie-Iran sur la création de zones sécurisées

 avec AFP
Signature, le 4 mai 2017 à Astana, d’un accord visant à créer des zones sécurisées en Syrie (AFP/Stanislav FILIPPOV)
La création de ces zones pourrait permettre d’instaurer un cessez-le-feu dans plusieurs régions syriennes. Mais le contenu de l’accord reste flou et ne fait pas l’unanimité. 

Les alliés du gouvernement Syrien, la Russie et l’Iran, ainsi que la Turquie, soutien des rebelles, ont adopté jeudi le dernier plan russe sur la Syrie. Il devrait permettre la création de zones sécurisées pour instaurer un cessez-le-feu dans plusieurs régions. Mais ni les émissaires du Gouvernement syrien, ni les rebelles présents à Astana, où les négociations se sont déroulées, n’ont approuvé ce plan.

Les rebelles et Damas n’approuvent pas

L’accord ne semblait pas susciter l’unanimité : un des membres de la délégation des rebelles a lancé un cri pour protester contre la signature du document par l’Iran, soutien du président Bachar al-Assad, et a quitté la salle.

Le plan russe est apparu au grand jour mardi pendant une conversation téléphonique entre le président russe et son homologue américain Donald Trump. Et, le lendemain, recevant le chef de l’Etat turc, Recep Tayyip Erdogan, dans la station balnéaire de Sotchi, sur les bords de la mer Noire, Vladimir Poutine avait déroulé son plan visant à «une plus grande pacification» de la Syrie, en guerre depuis six ans, et à «un renforcement du cessez-le-feu».

Pour cela, il s’agit de créer des «zones sécurisées» ou zones dites «de désescalade», un terme flou qui pourrait s’approcher de l’idée d’une zone tampon sans toutefois impliquer de déploiement massif de soldats pour assurer le cessez-le-feu.

Selon une version en arabe du projet obtenue par l’AFP, ces zones seront créées dans les territoires rebelles à Idleb (nord-ouest), dans la province centrale de Homs, dans l’enclave de la Ghouta (banlieue est de Damas) et dans la partie méridionale du pays. 

Des «zones sécurisées» seraient constituées de postes de contrôle et de centres de surveillance tenus conjointement par l’armée syrienne et les rebelles. Elles seraient mises en place autour des «zones de désescalade». Des unités militaires d’observateurs de pays non précisés, devraient aussi être déployées. Le président turc estime qu’elles permettraient de résoudre à «50%» le conflit syrien.

Astana, le pendant sécuritaire des pourparlers de Genève

Les négociations d’Astana sont présentées comme le pendant sécuritaire des pourparlers plus politiques sur l’avenir du pays qui se tiennent à Genève et demeurent dans l’impasse.
Les précédentes rencontres d’Astana s’étaient concentrées sur le renforcement d’une fragile trêve, instaurée en décembre entre l’armée syrienne et les groupes rebelles, mais menacée par des flambées régulières de violences.

SYRIE: DAMAS PRÊT À UNE TRÊVE À KHAN CHEIKHOUN POUR UNE ENQUÊTE

Publié le :

Lundi 24 Avril 2017 – 16:08 par France soir et l’AFP.

Dernière mise à jour :

Lundi 24 Avril 2017 – 16:10

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, le 24 avril 2017 lors d’une conférence de presse avec son homologue européenne, Federica Mogherini à Moscou

© Kirill KUDRYAVTSEV / AFP

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Auteur : Par AFP

Le régime syrien est prêt à instaurer un cessez-le-feu à Khan Cheikhoun, ville sous contrôle rebelle victime début avril d’une attaque chimique présumée, si des experts internationaux y sont envoyés pour enquêter, a annoncé lundi l’armée russe, alliée de Damas.

 

« La Syrie est prête à introduire un moratoire total sur les actions de ses forces armées, de son aviation et de son artillerie dans cette zone afin d’assurer la sécurité d’une mission d’experts à Khan Cheikhoun », dans la province d’Idleb (nord-ouest), a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué.

 

Le régime de Damas est prêt à prendre cette décision à la demande de la Russie, l’un de ses principaux alliés avec l’Iran, précise le communiqué.

« Nos collègues syriens ont également confirmé leur volonté d’assurer les conditions de sécurité nécessaires pour le travail d’une mission spéciale d’experts à l’aérodrome de Shayrat » utilisé par les forces gouvernementales et frappé en avril par des missiles américains, souligne le ministère russe.

Imputée au régime syrien, une attaque chimique présumée a fait le 4 avril 87 morts, dont 31 enfants, à Khan Cheikhoun, une petite ville contrôlée par des rebelles et des jihadistes dans la province d’Idleb.

La Russie et l’Iran ont demandé la semaine dernière à l’Organisation internationale pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) de mettre en place une nouvelle équipe chargée d' »établir si des armes chimiques ont été utilisées à Khan Cheikhoun et comment elles ont été livrées sur le site de l’incident présumé ».

Mais cette initiative ne tenait pas compte de l’enquête de l’OIAC déjà en cours et a été rejetée par l’organisation.

Moscou et Téhéran demandaient également aux enquêteurs de se rendre sur la base aérienne de Shayrat, frappée par les Etats-Unis après l’attaque chimique présumée du 4 avril, pour « vérifier les allégations concernant le stockage d’armes chimiques » à cet endroit.

Lundi, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a dit espérer que « l’OIAC enverra finalement (…) ses spécialistes à Khan Cheikhoun et à l’aérodrome et que tout sera transparent », lors d’une conférence de presse avec son homologue européenne, Federica Mogherini.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), il y a eu cinq morts dont un enfant et plusieurs blessés graves lundi en raison de bombardements aériens sur Khan Cheikhoun, qui ont visé le marché de la ville.

Syrie: l’évacuation de localités assiégées a repris après un attentat

 Un convoi transportant des Syriens évacués de localités assiégées, le 19 avril 2017 à Alep (afp)

Des milliers de Syriens ont été évacués de localités assiégées sous haute sécurité mercredi, quatre jours après l’interruption de l’opération par un attentat qui a fait une centaine de morts, dont de nombreux enfants.

Cette évacuation s’inscrit dans le cadre d’un accord entre le gouvernement Syrien et des représentants des rebelles après une série de sièges imposés par l’armée régulière et les rebelles.
Une cinquantaine de bus transportant 3.000 personnes sont partis à 04H00 (01H00 GMT) des localités loyalistes de Foua et Kafraya, assiégées depuis deux ans par les rebelles selon des informations de sources multiples.

Ils se sont ensuite rassemblés à Rachidine, une banlieue rebelle de la métropole d’Alep (nord), utilisée comme zone de transit, a constaté un correspondant de l’AFP.

Parallèlement, 11 autres bus ont quitté les localités rebelles de Zabadani, Serghaya et Jabal Charqi, dans la province de Damas, avec 300 personnes.

Après une journée de voyage, des bus sont arrivés mercredi soir dans la zone de Ramoussa, contrôlée par le gouvernement, au sud d’Alep.

Par crainte d’un nouvel attentat, les opérations se sont déroulées sous haute surveillance: plusieurs dizaines de rebelles armés gardaient les cars stationnés à Rachidine. Ces véhicules ont été disposés en demi-cercle afin de limiter les risques d’attaque.

Attendant près d’un bus, Oum Joud, 55 ans, affirme ne « pas avoir peur » car « tout est dans les mains de Dieu ». « Bien sûr j’aurais préféré rester dans ma maison, mais je l’ai quittée pour mes enfants et pour leur avenir », témoigne-t-elle.

Samedi, la première opération avait tourné au carnage lorsqu’un véhicule piégé avait explosé devant des bus sortis de Foua et Kafraya, faisant au moins 126 morts dont 68 enfants.
Le Gouvernement Syrien a accusé les rebelles, qui ont rejeté toute responsabilité et condamné l’attentat qui n’a toujours pas été revendiqué.

A Rachidine, les soldats de l’armée régulière syrienne de Foua et Kafraya, en treillis, des enfants et des personnes âgées se baladaient dans une grande cour où étaient stationnés les bus.

La même scène s’était produite samedi dernier, avant que le véhicule piégé ne sème la mort, notamment parmi des enfants qui étaient occupés à acheter des sachets de chips, selon des témoignages recueillis par l’AFP.

Le journaliste de l’AFP avait alors vu le sol jonché de cadavres, un grand nombre de blessés, et des bus dévastés. L’attentat avait arraché de nombreux enfants à leurs parents, beaucoup de blessés graves ayant été évacués en Turquie voisine.

Un accord conclu entre le Gouvernement Syrien et les groupes armés avec le parrainage de l’Iran et du Qatar –leurs alliés respectifs– avait prévu l’évacuation croisée de principalement quatre localités: Foua et Kafraya d’un côté, Madaya et Zabadani, localités rebelles de la province de Damas de l’autre.

Zabadani et Madaya « sont désormais vides de toute présence rebelle », a affirmé à l’AFP Mayyada al-Aswad, membre du comité de coordination du processus d’évacuation du côté du Gouvernement Syrien.

Avec ces évacuations, la première phase du processus est terminé: au total, 8.000 personnes auront quitté Foua et Kafraya, et 2.500 les quatre localités rebelles.

Une deuxième phase doit intervenir en juin, selon les termes de l’accord, qui prévoit l’évacuation totale de 30.000 personnes.

La destination finale des habitants de localités rebelles, selon le même accord, est la province d’Idleb (nord-ouest), contrôlée par insurgés et djihadistes. Ceux de Foua et Kafraya transitent par Alep, avant de se répartir dans les provinces de Damas et de Lattaquié (ouest).

Les rebelles, qui ont perdu de nombreux bastions face aux troupes de l’armée régulière –fortes de l’appui de la Russie– se sont vu contraints de signer des accords d’évacuation de nombreux de leurs bastions.

Les groupes armés ont qualifié « les transferts forcés de crimes contre l’Humanité », tandis que l’ONU a critiqué des « déplacements forcés ».

Début de l’évacuation pour quatre villes syriennes

Un peu d’espoir pour 30.000 Syriens dans le cadre du processus de réconciliation locale organisé par le gouvernement syrien au moyen d’accords avec certaines factions rebelles.

Deux jeunes syriennes attendent un traitement à Alep, après avoir été relachées par les rebelles en vertu d’un accord avec le gouvernement, le 12 avril 2017 (Afp)

Un accord pour évacuer quatre villes syriennes assiégées a commencé à être appliqué mercredi avec un échange de prisonniers entre rebelles et l’armée, selon des sources locales et un média d’Etat.
En tout, plus de 30.000 personnes sont censées être évacuées en vertu d’un accord conclu en mars et qui est parrainé par le Qatar, soutien des rebelles, et l’Iran, allié du régime de Bachar al-Assad.
Des milliers d’entre elles, civils et combattants, doivent commencer à être évacuées mercredi de Foua et Kafraya, deux localités chiites aux mains des forces gouvernementales dans la province d’Idleb (nord-ouest) et encerclées par les insurgés. Les évacuations concernent également Madaya et Zabadani, des enclaves rebelles assiégées par l’armée dans la province de Damas.
Les 16.000 habitants de Foua et Kafraya doivent partir pour se rendre vers Alep, Damas ou la province de Lattaquié (ouest).
Les civils habitant à Madaya et Zabadani devraient eux être autorisés à y rester s’ils le souhaitent. Ceux qui décideront de partir avec les rebelles se rendront dans les territoires tenus par l’opposition dans la province d’Idleb.
Un photographe de l’AFP à Alep (nord) a vu arriver dans la deuxième ville du pays, tenue par le régime, 12 des prisonniers relâchés par les rebelles, dont neuf semblaient blessés, ainsi que huit corps.
Selon l’agence de presse officielle syrienne Sana, quatre enfants et huit femmes ainsi que les corps de huit « martyrs », qui étaient retenus par des jihadistes dans la province voisine d’Idleb, ont été transférés à Alep.
Au même moment, « 19 activistes » qui avaient été kidnappés par les forces pro-régime et retenus à Foua et Kafraya ont été transférés en direction de zones tenues par les rebelles dans la province d’Idleb.
Une source au sein de l’alliance jihadiste Tahrir al-Cham a confirmé l’échange.
Des négociateurs et des habitants ont indiqué que des bus étaient entrés mercredi matin à Madaya et Zabadani, et que des gens rassemblaient leurs affaires pour partir.
Un coordinateur gouvernemental pour les négociations a cependant déclaré que les véhicules n’étaient pas encore arrivés dans ces localités.
« Les détails logistiques sont prêts, mais les groupes armés font traîner les choses », a-t-il affirmé à l’AFP.
« L’entrée des bus à Zabadani et Madaya a été un geste de bonne volonté de la part du gouvernement, mais ils ne partiront pas avant une sortie simultanée du convoi à Foua et Kafraya », a-t-il ajouté.
L’application de l’accord a été retardé en raison d’objections des deux camps et des tensions résultant d’une attaque chimique présumée dans une ville rebelle de Khan Cheikhoun, dans la province d’Idleb, la semaine dernière.
Depuis le début du conflit syrien en 2011, plusieurs opérations d’évacuation ont été organisées notamment pour des bastions insurgés asphyxiés par un long siège, le régime misant sur ce qu’il appelle des accords de « réconciliation locale » pour faire plier les rebelles.

CONCERT AU PROFIT DES ENFANTS D’ALEP

Nos adhérents en action :

 

Madame Andrée de Chadarévian nous fait part d’un concert donné par trente-trois musiciens qui vont jouer bénévolement pour les enfants d’Alep.

Les fonds récoltés seront transférés directement et intégralement, sans aucuns frais, par la Paroisse arménienne catholique de Paris à la Paroisse arménienne catholique d’Alep.

Ses 9 prêtres sont demeurés à Alep pendant toute la guerre. Ils connaissent de nombreuses familles, de toutes confessions, qui ont besoin d’une aide d’urgence.

Notre contribution portera essentiellement sur l’alimentation – il faut compter 5 à 7 euros par jour pour un enfant – les frais de scolarité  et les soins.

Venez nombreux. Apportez à ces enfants votre part d’aide.

Les « Monuments Men » syriens, en guerre culturelle contre l’État islamique

May Abdulhak  nous transmet un excellent article paru sans « L’Orient Le Jour » sur la mobilisation des Syriens pour la sauvegarde leur patrimoine.  Ce combat est admirable ,c’est une nouvelle illustration de la résilience de ce peuple qui démontre qu’il saura se relever et reconstruire leur Syrie unitaire. 

ENQUÊTE

Illustration Yvan Debs

Illustration Yvan Debs

Face aux pillages de tout bord, certains professionnels de l’art et du patrimoine choisissent l’exil, d’autres se font «douaniers », du côté des Kurdes.

Valentine LEROY | L’Orient Le Jour

08/04/2017

En 2012, ils œuvraient dans l’ombre, hébergés dans des hôtels insalubres de la frontière turque. La reconnaissance de leur travail leur vaut aujourd’hui un tout autre décor. Sous les bruits incessants des klaxons beyrouthins, les cliquetis des pinceaux à dépoussiérer et quelques bruissements de tissus se font répétition générale d’une guerre culturelle, celle menée par des Monuments Men* syriens contre l’État islamique (EI).

Dans les locaux de l’Unesco, plus de 400 professionnels du patrimoine syrien, répartis en plusieurs sessions de trois à cinq jours depuis 2014, ont appris à manier divers outils avec une précision chirurgicale afin de sauver les pièces syriennes menacées par les pillages. Des formations nécessaires « pour éviter de faire plus de mal à ces objets qu’on ne leur en a déjà fait », souligne, interrogé par L’Orient-Le Jour, Robert Bewley, directeur de projet et cofondateur de Eamena, programme de préservation des sites archéologiques menacés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Financés par l’Unesco, en partenariat avec Icomos, CyArk et Heritage for Peace, ces entraînements comprennent un programme complet fondé sur la préservation et le recensement du patrimoine syrien. « Les professionnels apprennent à prodiguer les gestes de premiers secours et à déplacer ces objets fragilisés par la guerre, le tout avec un minimum de moyens », explique M. Bewley. Ces enseignements vont du plus infime coup de pinceau sur les objets au scanner 3D portatif, ou à la photogrammétrie pour le recensement des monuments bâtis. Sur le terrain syrien, pas le droit à l’erreur, il faut se faire discret et efficace.

 « Si je me fais arrêter… »
Le mouvement est lancé en août 2012, suite à une explosion dans le quartier général du ministère de la Défense, à Damas. Maamoun Abdulkarim, directeur général des antiquités et musées de Syrie, pense alors à s’enfuir, par sécurité pour sa famille, avant de demander l’avis de sa fille, qui l’arrête : « Je n’ai pas envie que mes amies pensent que mon père est un lâche. » C’est décidé, ils restent. M. Abdulkarim lance alors l’évacuation des musées, une initiative qui permet de sauver, entre août 2012 et mars 2015, 99% du contenu de 34 établissements, selon le rapport de Heritage for Peace publié en mars cette année. « Les musées sont les premières victimes de la guerre », explique-t-il. Une vision partagée par Leila**, coéquipière de M. Abdulkarim, Monuments Woman et archéologue syrienne, interrogée par L’OLJ : « Certains diront que les dommages causés aux sites syriens font partie de leur histoire, je pense que les sauver fait partie de nos devoirs. » Les 300 0000 pièces récupérées sont alors cachées dans des coffres scellés aux alentours de Damas, dans des endroits tenus secrets.

Ces hommes et femmes risquent leur vie pour le patrimoine syrien. Quinze personnes l’ont ainsi perdue dans ces missions de sauvetage, selon Maamoun Abdulkarim. « Si je me fais arrêter, on me retrouvera probablement sur le marché, pas celui de l’art, celui de l’esclavage sexuel », confie Leila. Pour favoriser la réussite de ces missions, la Direction générale des antiquités et des monuments travaille avec les autorités internationales, mais également locales, telles que la police, les gouverneurs, les municipalités, les universités et associations privées, et d’autres entités de la sphère publique à Damas, Palmyre, Homs, Hama, ou encore Deir ez-Zor. Tous ont leur rôle dans l’encadrement de ces missions.

« Mon choix est fait »
Maamoun Abdulkarim, initiateur des Monuments Men en Syrie, insiste sur la nécessité de coopérer avec les forces militaires dans les zones à haut risque. « Je suis accepté comme scientifique dans certaines zones de Syrie, comme au Nord, où mes origines kurdes permettent de me faire entendre par les habitants. Pour les zones à risque, notamment au Sud, on s’entoure de forces militaires, mais je sépare le politique du scientifique. » Ce partenariat avec les forces du régime syrien en rebute toutefois plus d’un. C’est le cas d’Ayman*, archéologue syrien et Monuments Man, témoin des méfaits de certains soldats. « On parle de fouilles illégales ; moi, ce que j’ai vu, c’était du pillage, ni plus ni moins », martèle, à L’OLJ, le professionnel. C’est d’ailleurs ce qui l’a poussé à abandonner la mission de sauvetage du patrimoine et à opter pour l’exil. « J’avais le choix entre dénoncer ce que j’ai vu sans avoir l’assurance de changer cette réalité, ou me protéger et abandonner une mission qui ne sera jamais complétée à mes yeux. J’ai une famille, mon choix est fait », explique-t-il, déçu.

Face aux dérives de toutes les parties au conflit, Tayssir, également Monuments Man, a choisi le camp des Kurdes, « douaniers » de la frontière nord de la Syrie. Il empêche les pièces syriennes de sortir du pays, dernière étape avant que celles-ci ne se retrouvent sur le marché noir de l’art. Il croise donc régulièrement les pilleurs et note leur profil. D’après Tayssir, les soldats de l’EI ne sont pas les seuls à profiter de la guerre pour orchestrer des pillages. « Quand la communauté internationale pointe l’État islamique du doigt, ça en arrange plus d’un, qui en profitent pour faire leur marché sur les sites syriens », lance-t-il, amer, à L’OLJ. « On a arrêté plus de 15 000 objets à ce jour, on essaye d’empêcher toute pièce du patrimoine syrien de sortir du pays. Parce que, quand cela arrive, il y a de grandes chances pour qu’on ne les retrouve jamais », explique-t-il.

Marché noir
Les pilleurs constituent le premier échelon d’une immense hiérarchie de trafiquants. Les pièces récupérées sur le territoire de l’État islamique (EI) doivent être soumises au préalable à l’avis d’un chef local, qui peut choisir de les détruire ou de les laisser au pilleur après avoir récupéré une compensation financière, auquel cas ce dernier ne touchera qu’une infime partie du prix de vente final de la pièce. Ces objets soumis au marché noir passent de main en main dans de nombreux pays de transit tels que le Liban, Israël ou encore la Jordanie, avant d’atterrir aux États-Unis, au Japon ou, plus rarement, en Europe.
Qu’ils soient avec Maamoun Abdulkarim, du côté des Kurdes ou en exil, les Monuments Men ont œuvré et œuvrent encore contre ces pilleurs, préservant ainsi le patrimoine de la Syrie. Mais la majorité des œuvres pillées se trouve maintenant hors de Syrie, dans les réseaux du marché noir de l’art (lire ci-contre).

*Les Monuments Men sont des sauveurs d’art en temps de guerre. Ils ont eu droit à un buzz énorme en 2014 avec le film Monuments Men de George Clooney, adaptation du livre éponyme de Robert M. Edsel, paru en 2009.

**Les prénoms ont été modifiés.

Le Dark Web, théâtre du marché noir artistique de l’EI
Installé en Turquie depuis le début du conflit syrien en 2011, Bassem pianote sur le clavier de son ordinateur, sourire en coin. Du haut de ses 29 ans, le jeune Syrien s’est spécialisé dans la recherche de trafiquants de pièces syriennes sur le Dark Web, face cachée de la toile où se regroupent les plus grands réseaux de trafic au monde, mais également bête noire de l’organisation internationale de police criminelle Interpol. En partenariat avec l’Unesco, cette dernière cherche à identifier et intercepter les pièces syriennes pillées puis revendues sur le « dark web ».

Seulement, la nature de ce sous-ensemble de la toile rend la traque hasardeuse, et le recensement des pièces, difficile. « Accéder au Dark Web requiert une expérience en informatique plus qu’avancée et un large réseau dans le milieu, explique Bassem, contacté par L’Orient-Le Jour via Skype. Il faut d’abord télécharger un logiciel bien particulier, puis un VPN, mais surtout, il faut connaître l’adresse de la page visée. » Le Dark Web est constitué d’un ensemble de pages non indexées, c’est-à-dire introuvables via un moteur de recherche. On estime l’ampleur de celui-ci à plus de 600 téraoctets de données, soit plus de 90% de l’ampleur totale du web. Qui plus est, par un système d’onion rooting et d’adresses IP impossibles à tracer, les visiteurs des sites contenus sur cette facette de la toile semblent échapper à toute autorité. « Il est difficile de quantifier l’ampleur de ce trafic.

Ce que l’on sait, c’est qu’il nous faudra des dizaines d’années et autant de millions de dollars pour espérer récupérer certains de ces objets ou ornements », explique à L’OLJ Édouard Planche, chargé du programme de lutte contre ce commerce illicite des biens culturels à l’Unesco. Pour cela, l’organisme compte sur le soutien financier des États, de l’Union européenne, mais également de fondations privées. « Malheureusement, il y a certaines pièces que l’on ne retrouvera jamais », souligne-t-il.

Financer le terrorisme
Bassem a fait de cette vision fataliste sa motivation. « Jamais je ne me résoudrai à abandonner cette mission pour le patrimoine syrien. C’est mon histoire qui est en jeu, je sais me servir du Dark Web, j’ai mon réseau, je le mettrai à profit pour retrouver les pièces pillées autant que je le pourrai », affirme-t-il.

Ce génie de l’informatique a ainsi réussi à identifier plusieurs pièces pillées sur des sites syriens, qu’il a par la suite référencées via la centralisation de données concernant les pièces syriennes disparues, une initiative de l’Unesco et de ses partenaires. Pour les reconnaître, Bassem s’aide des listes rouges de l’ICOM, qui délivrent une typologie de pièces provenant de zones pillées. Aubaine pour ces Monuments Men du net, calvaire pour le marché noir, ces listes rendent presque impossible la revente de pièces telles que les bustes de Palmyre, que l’on ne trouve nulle part ailleurs. « J’ai pensé un temps à acheter les pièces que je trouvais, mais la monnaie du Dark Web, le bitcoin, connaît un cours tellement haut que ce n’était financièrement pas possible, explique Bassem. Et puis, je me suis vite rappelé qu’acheter ces pièces, c’est financer le terrorisme. »

« Les sortir du cercle de l’EI »
D’autres n’ont pas vraiment les mêmes scrupules. Ni les mêmes intentions. C’est le cas de Hady*, un collectionneur beyrouthin que L’Orient-Le-Jour a rencontré et qui possède notamment un buste de Palmyre. À ses yeux, l’œuvre passe pour un simple « investissement sur le long terme ».
« J’attends que cette histoire de pillage se tasse, pour ensuite le revendre une fortune », dit-il, assez fièrement. Financer une entité terroriste pour des besoins personnels ne stoppe pas l’appétit du collectionneur. « Je ne suis pas un terroriste, je préfère me voir comme une sorte de sauveur d’œuvres d’art, puisque je les sors du cercle de l’EI », explique-t-il. Hady conserve en moyenne un quart des œuvres réceptionnées et fait de ce trafic son fond de commerce. Pour parvenir à ses fins, il redouble d’effort en matière de précautions. Une fois l’accord scellé avec le vendeur, il lui transmet l’adresse de son coursier, un homme qu’il « paye pour mettre son adresse et son nom sur cette livraison ». « Si quelqu’un intercepte le colis, c’est lui qui tombe », résume Hady. Les intermédiaires ne connaissent pas sa véritable identité. Du Dark Net à son hangar, il utilise de multiples identités, toutes falsifiées. Ces transactions lui valent, selon les critères d’Interpol, le statut de trafiquant à échelle mondiale, ce qui ne l’arrête pourtant pas dans sa quête, insatiable. « C’est une vraie drogue, entre l’adrénaline face au risque de se faire prendre, et le besoin de collectionner », ajoute-t-il.
Ce commerce se présente comme une « véritable bombe à retardement », selon Édouard Planche. Le cœur de la lutte contre le trafic d’antiquités syriennes se tiendra en effet d’ici à une dizaine d’années, lorsque les pillages ne seront plus qu’une page tournée du passé syrien.
En attendant, Basem, cyber-Monuments Man, continue de pianoter.

 

Communiqué de l’AFS sur l’utilisation d’armes chimiques en Syrie

A l’instar du monde entier, l’association d’Amitié France-Syrie a appris avec stupéfaction l’utilisation d’armes chimiques lors d’un bombardement à Khan Cheikoun. Elle ne peut qu’exprimer le sentiment d’horreur qui l’étreint devant cette escalade inacceptable du conflit dans ce pays déjà profondément éprouvé. Elle condamne avec la plus vive fermeté tout acte provoquant la mort de civils innocents et l’utilisation d’armes cruelles et prohibées qui entraînent que des conséquences néfastes sur les efforts déployés pour l’obtention d’un dénouement rapide à cette guerre qui n’a que trop duré.

Elle ne peut que déplorer l’escalade des bombardements qui nuit gravement aux efforts de paix dont toute la population syrienne a tant besoin après 6 ans d’une guerre atroce.

Résolutions de la conférence de Bruxelles sur la Syrie.

1. La haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice‑présidente de la Commission européenne, le secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence des Nations unies et les ministres des affaires étrangères de l’Allemagne, du Koweït, de la Norvège, du Qatar et du Royaume-Uni ont présidé ce jour à Bruxelles une conférence sur le conflit syrien et ses répercussions dans la région. Cette conférence, qui s’inscrit dans le prolongement de celles qui se sont tenues précédemment au Koweït et à Londres, a rassemblé les représentants de plus de 70 pays et organisations internationales et des représentants de la société civile syrienne et internationale.

2. Le conflit en Syrie provoque des destructions et des souffrances humaines d’une énorme ampleur. En particulier, la Conférence a condamné l’utilisation d’armes chimiques par le gouvernement et l’EIIL/Daech, constatée par le mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC et des Nations unies, ainsi que les attaques dont Khan Cheikhoun a été la cible hier. L’utilisation d’armes chimiques, par qui que ce soit et où que ce soit, doit cesser immédiatement.

3. La communauté internationale est fermement résolue à se mobiliser et à unir ses efforts en faveur d’un avenir pacifique pour la Syrie et l’ensemble de sa population. À cette fin, les participants à la conférence ont souligné l’importance de maintenir un pays souverain, indépendant, unitaire et territorialement intègre, où tous les Syriens pourront vivre en paix et en sécurité. Leur objectif est de continuer à progresser sur la voie d’une paix durable et sans exclusive tout en répondant à l’urgence des besoins humanitaires et des besoins en matière de résilience sur le territoire syrien et en soutenant les efforts consentis par les pays voisins pour accueillir plus de cinq millions de réfugiés.

4. Les participants à la conférence ont reconnu que les besoins humanitaires et les besoins en matière de résilience des personnes vulnérables (en particulier des femmes et des enfants) n’ont jamais été aussi grands en Syrie et dans la région. Ils ont pris acte des appels de fonds coordonnés des Nations unies visant à récolter 8 milliards d’USD en 2017 pour répondre aux besoins d’assistance et de protection en Syrie, ainsi qu’en Turquie, au Liban, en Jordanie, en Iraq et en Égypte. Ils ont salué la générosité dont continuent de faire preuve les pays d’accueil voisins et leurs populations en offrant un refuge à des millions de personnes déplacées. Ils se sont accordés à reconnaître qu’une aide financière massive et des approches novatrices et globales sont nécessaires pour faire face aux énormes besoins des populations, en Syrie et dans les pays voisins, et pour renforcer la résilience des communautés d’accueil. La générosité des participants s’est traduite par la promesse de verser $ 6 milliards (€ 5.6 milliards) en 2017 et par des promesses de dons pluriannuels pour un montant de $ 3.73 milliards (€ 3.47 milliards) for 2018-2020. En outre, certaines institutions internationales et certains donateurs ont annoncé des prêts pour un montant d’environ $ 30 milliards (€ 27.9 milliards) dont un nombre d’éléments seront assortis de conditions préférentielles. Les coprésidents et d’autres sont convenus d’élargir la base de ressources et de veiller à une plus grande prévisibilité, cohérence et efficacité de l’aide en traduisant les engagements du « Grand Bargain » pris lors du sommet humanitaire mondial en actions dont les fruits concrets bénéficieront aux populations touchées par le conflit syrien.

5. Toutefois, l’aide humanitaire ne suffira pas à elle seule à mettre un terme aux souffrances de la population syrienne en l’absence d’une solution politique négociée entre les parties syriennes sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies, notamment de la résolution 2254, et du communiqué de Genève de 2012. Les participants à la conférence ont souligné le fait que, pour être durable, toute solution au conflit doit répondre aux aspirations démocratiques et aux besoins de la population syrienne et garantir la sûreté et la sécurité de tous. Seule une véritable transition politique sans exclusive permettra de mettre fin au conflit.

6. Les participants ont dès lors réitéré leur soutien et leur engagement sans réserve à l’égard des pourparlers intrasyriens encadrés par les Nations unies à Genève, seule enceinte où une solution politique devrait être négociée. Ils ont salué les pourparlers de Genève, ont appelé de leurs vœux de nouvelles avancées et ont loué les efforts inlassables de l’envoyé spécial des Nations unies. Le rôle de la société civile, notamment des organisations de femmes, a été reconnu comme un élément essentiel d’une solution durable. Les participants se sont penchés sur la manière dont la communauté internationale et les pays de la région peuvent contribuer à garantir le succès de ces pourparlers.

7. Les participants ont reconnu le rôle constructif que les acteurs régionaux peuvent jouer afin de faciliter le règlement du conflit et se sont félicités de l’initiative de l’UE visant à dégager un terrain d’entente entre eux sur l’avenir de la Syrie.

8. Les réunions d’Astana peuvent jouer un rôle déterminant en consolidant et en renforçant le cessez-le-feu à l’échelle du pays garanti par la Russie et la Turquie, avec, désormais, la participation de l’Iran. Les contributions constructives de ces réunions devraient venir compléter les efforts des équipes spéciales de Genève. Bien qu’ils soutiennent ces efforts, les participants ont exprimé leurs vives préoccupations face à la poursuite des activités militaires et ont exhorté toutes les parties à redoubler d’efforts pour parvenir à un respect total du cessez-le-feu. Un véritable cessez-le-feu devrait faciliter un accès humanitaire sans entrave à l’ensemble du pays. Les participants ont également reconnu qu’il était important, pour instaurer un climat de confiance, de prendre des mesures concrètes immédiates, telles que la libération des détenus et des personnes enlevées, l’échange de prisonniers et la remise des corps, aux fins de l’identification des personnes disparues. Les participants ont salué la volonté des Nations unies de fournir un appui technique pour améliorer l’efficacité du mécanisme trilatéral mis en place pour vérifier le respect du cessez-le-feu.

9. La protection des civils reste primordiale. Les participants ont condamné les violations persistantes, par les parties au conflit, du droit humanitaire international et du droit international relatif aux droits de l’homme, notamment les attaques visant délibérément des civils et des infrastructures civiles, en particulier des infrastructures médicales et éducatives et des lieux de culte, et les violences à caractère sexuel ou sexiste. En particulier, ils ont pris acte des conclusions de la commission d’enquête du siège des Nations unies concernant le convoi des Nations unies et du Croissant-Rouge arabe syrien. Les participants ont aussi condamné les atrocités commises par l’EIIL/Daech et d’autres groupes terroristes désignés par les Nations unies, et ont réaffirmé qu’ils étaient résolument déterminés à vaincre ces derniers. Les coprésidents ont appelé à soutenir, y compris en mobilisant des moyens financiers appropriés, la mise en œuvre de la résolution 71/248 de l’Assemblée générale des Nations unies qui instaure un mécanisme international, impartial et indépendant visant à faire en sorte que les auteurs de ces violations systématiques, généralisées et flagrantes du droit humanitaire international et des droits de l’homme en Syrie aient à répondre de leurs actes.

10. Les participants ont rappelé qu’il était urgent de permettre un accès humanitaire rapide, sûr, durable et sans entraves à l’ensemble du pays, pour que les agences des Nations unies et les ONG puissent atteindre toutes les populations en détresse en empruntant les itinéraires les plus directs, y compris à travers les lignes de front et les frontières, tout comme il est urgent de mettre un terme à tous les refus d’accès humanitaires arbitraires. La tactique consistant à affamer les populations civiles en les assiégeant et le déplacement forcé de civils, constatés par la commission d’enquête mise en place par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, constituent des violations manifestes du droit humanitaire international. Ces pratiques sont inacceptables et doivent cesser immédiatement. Il reste impératif d’apporter une aide humanitaire et une protection immédiates à tous ceux qui en ont besoin sur l’ensemble du territoire syrien. Les participants ont salué le travail des organisations d’aide internationales, régionales et syriennes et ont invité les responsables sur le terrain à faire en sorte que les travailleurs humanitaires et le personnel médical puissent remplir leur mission sans courir le risque de subir des violences. Les opérations humanitaires de déminage visant à réduire les risques liés aux engins explosifs en Syrie sont également reconnues comme essentielles pour la protection des civils. Les pays voisins ont été invités à continuer de faciliter l’accès de l’aide humanitaire.

11. Les participants ont reconnu les difficultés que la présence prolongée de millions de réfugiés syriens entraîne pour les pays voisins, notamment la Jordanie, le Liban et la Turquie, et ils ont félicité les gouvernements de ces pays, ainsi que ceux de l’Iraq, de l’Égypte et d’autres pays de la région, États du Golfe inclus, qui accueillent un grand nombre de personnes en provenance de Syrie, pour avoir pris la tête des efforts déployés pour faire face aux conséquences du conflit. Les participants ont pris acte de la résolution de la Ligue des États arabes sur la crise des réfugiés syriens et ont réaffirmé leur ferme volonté d’aider les pays d’accueil à fournir des services publics, une protection et une assistance aux réfugiés et aux communautés qui les accueillent. Ils ont particulièrement rendu hommage à tous ceux qui ont fourni cette aide dans les circonstances les plus difficiles. Les gouvernements de la région ont accompli des progrès substantiels dans la réalisation des objectifs de la conférence de Londres et les participants ont loué la générosité des pays qui accueillent des réfugiés.

12. Les coprésidents et d’autres ont reconnu qu’il était nécessaire de soutenir le développement économique de la Jordanie et du Liban, pour les aider à faire face aux conséquences de cette crise prolongée, et d’offrir aux Syriens des possibilités d’assurer leur subsistance. Ils ont salué les progrès réalisés dans l’ouverture des marchés du travail aux réfugiés et sont convenus de soutenir des programmes de création d’emplois compatibles avec les stratégies de développement économique et social adoptées par les gouvernements des pays d’accueil. Gardant à l’esprit la nécessité d’accélérer les progrès afin de créer 1,1 million d’emplois, les coprésidents se sont engagés à soutenir la croissance économique au bénéfice de tous, notamment par l’ouverture d’un accès aux marchés extérieurs, l’octroi de financements à des conditions préférentielles et le développement des infrastructures. Ils ont invité les autres participants à se joindre à eux pour appuyer les réformes nécessaires, parmi lesquelles l’amélioration de la réglementation et du climat d’investissement, le renforcement des liens entre les secteurs public et privé et l’adoption de stratégies claires en matière de réformes. Les participants se sont engagés à élargir l’accès des réfugiés et des communautés d’accueil à une formation professionnelle tenant dûment compte des besoins de main-d’œuvre du secteur privé et accompagnée de programmes de mise en adéquation des compétences. Les moyens mis en œuvre pour concrétiser notre vision partagée sont détaillés dans les documents en annexe.

13. Les participants sont convenus de continuer à poursuivre l’objectif « Non à une génération perdue d’enfants », en Syrie et dans la région, et d’intensifier les efforts visant à atteindre l’objectif d’un enseignement de qualité, accessible aux filles comme aux garçons, pour tous les enfants réfugiés et tous les enfants vulnérables des communautés d’accueil. Ils se sont engagés à améliorer l’accès à l’éducation pour 1,75 million d’enfants déscolarisés en Syrie même. À cet égard, ils sont également convenus de concentrer leurs efforts sur l’amélioration des résultats d’apprentissage des garçons et des filles issus des communautés de réfugiés et des communautés d’accueil vulnérables et de prévenir les abandons scolaires dus à des obstacles financiers ou autres.

14. Les participants ont souligné l’étroitesse des liens entre la protection, l’éducation et les moyens de subsistance et ont salué l’engagement renouvelé des pays d’accueil à protéger les réfugiés, y compris en luttant contre les facteurs qui les mettent en situation d’illégalité. Il faut renforcer l’aide humanitaire visant à répondre aux besoins élémentaires des réfugiés les plus vulnérables, en prêtant une attention particulière aux enfants et aux femmes. Les participants ont reconnu le rôle essentiel de la réinstallation en tant qu’instrument de protection des réfugiés particulièrement vulnérables, pour offrir, avec d’autres filières légales d’admission, un accès sûr et digne à la sécurité au-delà du voisinage immédiat de la Syrie. L’importance d’un retour sûr, volontaire et digne des réfugiés, dans le respect du droit international et une fois les conditions réunies, a été reconnue.

15. La reconstruction et l’aide internationale à sa mise en œuvre ne seront un dividende de la paix que lorsqu’une transition politique crédible sera fermement engagée. Il est crucial d’avancer dans la planification de l’après-accord afin d’être prêts à réagir rapidement et efficacement lorsque les conditions énoncées dans la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies et dans le communiqué de Genève seront en place. Les participants se sont donc félicités des travaux réalisés par l’équipe spéciale interorganisations des Nations unies chargée de la planification de l’après-accord et des efforts déployés par cette équipe pour nouer le dialogue avec les parties prenantes concernées et assurer la coordination au niveau international, et ils ont pris acte des principes de stabilisation civile définis lors de la conférence de Londres. Les Nations unies, l’UE et la Banque mondiale procèdent actuellement à des analyses des dommages et des besoins en vue de lancer, le moment venu, une évaluation complète portant sur le relèvement du pays et la consolidation de la paix. Les coprésidents et d’autres ont réfléchi à la façon dont les Syriens et leurs voisins pourraient contribuer à la reconstruction et au relèvement économique de la Syrie une fois qu’une transition politique crédible sera fermement engagée.

16. Les participants ont reconnu que, pour réussir, la reconstruction devra s’inscrire dans le cadre d’une transition véritable et sans exclusive qui bénéficiera à tous les Syriens. Pour garantir une paix durable, il sera nécessaire de répondre aux revendications légitimes et aux aspirations démocratiques de la population syrienne. La réconciliation et la justice transitionnelle feront elles aussi partie intégrante du processus de reconstruction pacifique du pays.

17. L’annexe relative à la levée de fonds présente les promesses de dons annoncées durant la présente conférence. Les coprésidents se sont engagés à suivre la concrétisation de ces promesses et à faire rapport à ce sujet, en coordination avec les Nations unies. Ils se sont également engagés à faire régulièrement le point, à l’occasion de grands événements internationaux qui se tiendront au cours de l’année, sur les progrès accomplis dans la réalisation des engagements pris pendant la présente conférence.

18. Les participants à la conférence de ce jour se sont accordés sur une approche globale à l’égard de la crise syrienne. Ils ont souligné la nécessité de continuer à faire face à la situation humanitaire désastreuse en apportant aide et protection aux populations en détresse dans le respect des principes en vigueur et en soutenant les pays voisins. Les souffrances de ces populations sont telles qu’il est plus urgent que jamais de dégager une solution politique. Déployer des efforts politiques pour favoriser le règlement de la crise est dès lors crucial pour garantir un avenir à la Syrie et à sa population. Seuls les Syriens peuvent parvenir à l’accord qui garantira la paix, mais il est essentiel que la communauté internationale et les pays de la région se mobilisent pour les aider à obtenir cet avenir pacifique. L’établissement d’une paix durable et sans exclusive en Syrie pour les Syriens reste l’objectif vers lequel tendent tous nos efforts

ALEP,la vie dans les décombres

Nous vous recommandons d’écouter ce reportage sur France Inter dans le cadre de  l’émission: INTERCEPTION de Christian Chesnot  Grand reporter.

Ce reportage montre la formidable résilience du peuple syrien et son souffle d’optimisme même si la vie continue à être dure, mais moins dure maintenant que les canons se sont tus.

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https://www.franceinter.fr/emissions/interception/interception-02-avril-2017

Plus de cinq millions de réfugiés syriens

Des enfants syriens déplacés, le 4 mars 2017 à Kharufiyah, au sud de Manbij / AFP/Archives

Des enfants syriens déplacés, le 4 mars 2017 à Kharufiyah, au sud de Manbij / AFP/Archives

Plus de cinq millions de Syriens, soit environ un quart de la population, sont devenus des réfugiés, a annoncé jeudi l’ONU, alors que des ONG exhortent de nouveau la communauté internationale à accroître son aide.

« C’est une étape importante », a résumé la porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) en commentant ce nombre record de réfugiés.

« Alors que le nombre d’hommes, de femmes et d’enfants ayant fui six années de guerre en Syrie a franchi la barre des 5 millions, la communauté internationale doit faire davantage pour les aider », a lancé le HCR.

Plus de 5 millions de régugiés syriens dans les pays voisins / AFP

Plus de 5 millions de régugiés syriens dans les pays voisins / AFP

La guerre en Syrie a déclenché la plus grave crise humanitaire depuis la Seconde guerre mondiale, avec plus de 320.000 morts en six ans et des millions de déplacés. Le pays comptait 22 millions d’habitants avant la guerre.

Malgré une baisse d’intensité des combats dans plusieurs régions, « la situation n’est pas encore assez sûre pour que les gens puissent retourner chez eux. Nous voyons encore chaque jour des gens être déracinés », a souligné à l’AFP Alun McDonald, le porte-parole régional de Save the Children.

Il a regretté que la communauté internationale, incapable de régler le conflit, a failli à augmenter son aide au fur et à mesure que la crise humanitaire s’aggravait, fermant au contraire de plus en plus les frontières, notamment en Europe.

Vue aérienne du camp de Bab al-Salama pour les réfugiés syriens, le 23 mars 2017 à Azaz, en Turquie / AFP/Archives

Vue aérienne du camp de Bab al-Salama pour les réfugiés syriens, le 23 mars 2017 à Azaz, en Turquie / AFP/Archives

Près de trois millions de Syriens sont réfugiés en Turquie, le pays voisin le plus affecté, selon le HCR. Moins de 10% d’entre eux ont été accueillis dans des camps, tandis qu’une majorité vit dans les villes, dont plus de 500.000 à Istanbul.

Plus d’un million ont fui au Liban et 657.000 en Jordanie, mais les autorités d’Amman évaluent leur nombre à 1,3 million. Ils sont par ailleurs plus de 233.000 en Irak, plus de 120.000 en Egypte et près de 30.000 dans les pays d’Afrique du Nord, selon le HCR.

– Les enfants affectés –

Dans un communiqué conjoint avec des organisations syriennes, l’organisation Oxfam a appelé jeudi à apporter plus d’aide aux pays voisins de la Syrie.

Sa directrice exécutive, Winnie Byanyima, a appelé « les pays riches à afficher leur soutien aux voisins de la Syrie qui ont accueilli ces réfugiés et à relocaliser au moins 10% des réfugiés syriens les plus vulnérables d’ici la fin 2017 ».

Une Syrienne tient son enfant dans ses bras, dans un camp de réfugiés à Ain Issa, à 50 km de la ville de Raqa, le 25 mars 2017 / AFP/Archives

Une Syrienne tient son enfant dans ses bras, dans un camp de réfugiés à Ain Issa, à 50 km de la ville de Raqa, le 25 mars 2017 / AFP/Archives

« Il s’agit d’une crise qui dure et les financements ne suivent pas », a déploré la porte-parole d’Oxfam à Beyrouth, Joëlle Bassoul, à l’AFP. « Avec moins de ressources, nous devons aider maintenant plus de personnes ».

Les ONG et l’ONU mettent également régulièrement en garde contre les conséquences à long terme de la crise, tout particulièrement sur les enfants.

« Un million d’enfants réfugiés syriens ne sont pas scolarisés (…) et ils sont ceux qui devront contribuer à reconstruire la Syrie pour la prochaine génération », a indiqué M. McDonald, de Save The Children.

Outre ces cinq millions de réfugiés, des millions d’autres Syriens sont déplacés dans leur propre pays.

La plupart ont été obligés de fuir les combats entre les différents acteurs en conflit, et d’autres ont été déplacés à l’issue d’accords en rebelles et régime. Plus de 30.000 personnes doivent ainsi être évacuées dans les prochains jours de quatre localités assiégées.

Déclenchée en mars 2011 par la répression de manifestations pro-démocratie, la guerre en Syrie s’est progressivement complexifiée avec l’implication de groupes jihadistes, de forces régionales et de puissances internationales, sur un territoire très morcelé.

Aucune solution n’est en vue pour le conflit malgré plusieurs rounds de négociations indirectes entre régime et opposition sous l’égide de l’ONU, dont l’un est en cours actuellement à Genève.

afp