Haytham Manna: Le dégagement de 70.000 combattants non syriens de Syrie, un préalable à la stabilisation du conflit.

 

M. Haytham Manna, président du Mouvement QAMH (Valeurs, Citoyenneté, Droits), figure de proue de l’opposition démocratique syrienne, a estimé que le dégagement de 70.000 combattants non syriens de Syrie doit constituer un préalable à la stabilisation du conflit, jugeant que l’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, se livre à un vain exercice culinaire consistant à «faire cuire des cailloux».

Ci joint l’intégralité de sa mise au point parvenue au site www.madaniya.info samedi 25 Février 2017, au lendemain de la fin de la 4 ème phase des pourparlers inter syriens de Genève:

« De nombreux amis, de même que des journalistes et hommes politiques syriens et non syriens, ont multiplié les contacts avec moi pour s’enquérir des raisons de mon absence de la scène médiatique, en pleine phase de reprise des pourparlers inter syriens de Genève, une ville où je réside.

Suite à ces appels, il m’importe d’apporter les précisions suivantes »:

A PROPOS DE STAFFAN DE MISTURA: UN VAIN EXERCICE CULINAIRE CONSISTANT À «FAIRE CUIRE DES CAILLOUX», EN GUISE DE «CÉRÉMONIE D’ADIEU».

«En tant que citoyen syrien, agissant en toute indépendance d’esprit, j’ai considéré depuis plus d’un an que M. Staffan de Mistura, n’est plus le représentant spécial de l’ONU sur la Syrie, mais le simple coordinateur des positions des états parrains du conflit et que le diplomate n’est pas un élément de la solution mais du problème.

«En conséquence, je refuse de participer à la cérémonie d’adieu de M. De Mistura se déroulant sous couvert d’un mensonge collectif opéré tant sur le plan international que régional que syrien.

LE MANDAT DU HAUT COMITÉ DES NÉGOCIATIONS (SOUS LA COUPE SAOUDIENNE) A EXPIRÉ EN DÉCEMBRE 2016.

«De ma vie, je n’ai considéré une posture négative comme une forme d’attitude constructive. Aussi ai-je veillé depuis deux mois à tenir une conférence groupement les principales composantes de l’opposition syrienne avec la participation de personnalités syriennes indépendantes,

  • d’autant plus que le mandat d’un an du Haut Comité des Négociations a expiré en décembre 2016; et que cette instance n’est plus habilitée à négocier au nom de l’ensemble de l’opposition
  • que la composante Moscou est une instance consultative entre l’opposition et le pouvoir;
  • que la composante le Caire a été neutralisée par les efforts conjoints de l’Égypte et de la Russie;

De surcroît M. De Mistura a refusé de rencontrer des dirigeants de ce groupement, cédant en cela aux pressions d’un «état agissant sur le terrain», faisant avorter la rencontre projetée avant la tenue de la pseudo conférence de reprise des pourparlers de paix sur le Syrie (Genève 4).

Les principaux groupements de l’opposition auxquels fait référence le document sont: le groupement du Caire (Groupement de personnalités indépendantes militaires et civiles de l’opposition démocratique syrienne), la Coalition Nationale (tendance Turquie-Qatar) et le Haut Comité pour les Négociations (tendance Arabie saoudite).

LE PROJET DE NOUVELLE CONSTITUTION DE LA SYRIE, UN DOCUMENT RÉDIGÉ PAR SIX ÉTATS.

«Dès le 30 septembre 2015, j’ai précisé à M. Qadri Jamil, ancien vice premier ministre syrien, proche de Moscou, lors d’un rencontre au Caire, que je ne me rendrai pas à Moscou tant que la Russie n’aura pas apporté la preuve tangible qu’elle se veut un intermédiaire et non comme une partie prenante au conflit, mais que je ne refuserai pas de rencontrer des responsables du ministère russe des Affaires étrangères dans tout autre pays neutre.

«J’ai refusé plus d’une invitation de Moscou, dont la dernière en date le 27 janvier 2017. Au point que l’ambassadeur russe s’étonnant de mon attitude m’a un jour apostrophé en ces termes: «Tu fais de la surenchère sur la coalition, qui, elle, nous rend visite» ?

« Je lui ai répondu: Il s’agit d’une position de principe qui n’implique ni surenchère, ni tentative de minoration du rôle de la Russie. J’ai qualifié la constitution irakienne de «Constitution Bremer» ( du nom du premier pro consul américian en Irak Paul Bremer) et vous présentez un texte aux Syriens, eux, qui ont contribué à la rédaction de la constitution de six Etats ? Quelle honte.

POUR UN DÉGAGEMENT DE 70.000 COMBATTANTS NON SYRIENS, D’OÙ QU’ILS VIENNENT ET QUELQUE SOIT LEUR ALLÉGEANCE

«J’ai précisé aux États parrains de la conférence d’Astana (Kazakhstan) que nous sommes favorables à toute négociation visant à mettre un terme à la violence haineuse et la mort gratuite de citoyens syriens. Un tel projet implique que le processus soit assorti d’un calendrier de retrait et d’une cartographie du déploiement des forces afin de mettre en œuvre le dégagement de tous les combattants étrangers de Syrie d’où qu’ils viennent, quelque soit leur allégeance.

«La présence de 70.000 combattants non syriens en Syrie signifie la prolongation de la violence sur plus d’une décennie.

«J’ai enfin confirmé à tous les intervenants que l’émissaire spécial de l’ONU en Syrie, M. Staffan De Mistura, se livre en fait à un vain exercice culinaire consistant à faire cuire des cailloux» (Tabkhet Bahs)

«Je m’abstiens de toute précision complémentaire afin de ne pas être accus de chercher à faire capoter les négociations.

en partenariat avec www.madaniya.info

A Palmyre, des musiciens veulent effacer les flétrissures de l’EI

Sur la scène du théâtre antique de Palmyre, que l’armée syrienne vient de reprendre au groupe Etat Islamique (EI), Angel Dayoub interprète le célèbre refrain arabe: « Nous serons de retour« .

La voix mélodieuse de cette chanteuse de 15 ans emplit cet édifice du IIe siècle, lourdement endommagé par l’EI, qui a abandonné la ville jeudi à l’approche de forces gouvernementales soutenues par la Russie.
« Les quelques destructions ne nous décourageront pas de venir chanter et jouer ici », dit-elle à l’AFP.
« Je veux jouer de la musique et chanter partout où l’EI a été chassé car ce groupe hait la chanson et interdit de jouer d’un instrument », ajoute-t-elle sur un ton de défi.

Pour son interprétation de la fameuse chanson de la diva libanaise Fayrouz, Angel est accompagnée par des amis musiciens jouant du violon, du tambourin ou de l’oud, le luth oriental.

« Nous serons de retour » (Fayrouz)

 

« Nous chantons ‘Nous serons de retour’ car nous allons revenir encore plus fort. Chacun reconstruira le pays à sa manière. Nous voulons le faire avec la musique et la chanson », explique-t-elle.
Palmyre, située en plein désert dans le centre du pays et dont les ruines ont été inscrites au patrimoine mondial de l’humanité en 1980, a changé plusieurs fois de mains lors des six ans de guerre.
L’EI s’en est emparé en mai 2015 et a détruit et vandalisé des trésors archéologiques durant dix mois d’un premier règne brutal.
A la recherche d’un spectaculaire mortifère, les jihadistes s’étaient livrés dans le théâtre romain à des exécutions, avant d’en être chassés en mars 2016.
Mais ils étaient revenus en décembre. Ils avaient alors détruit le tétrapyle, un monument de 16 colonnes érigé à la fin du IIIe siècle, et saccagé le théâtre.
Les jeunes musiciens ont donné un aperçu de leur talent devant une audience de soldats syriens et russes auxquels s’étaient joints des journalistes effectuant une visite organisée par l’armée.
Des explosions étaient encore audibles, en raison des combats des forces syriennes et de leurs alliés russes contre l’EI au nord et à l’est de la ville.
« Daech (acronyme en arabe de l’EI) voulait interdire le théâtre, la chanson, mais moi je veux les défier », assure Maysaa al-Nuqari, une jeune joueuse d’oud.
Vêtue d’une veste en cuir noir et de bottes de combat, cette jeune fille aux cheveux frisés teints en rouge appelle les autres musiciens à venir jouer.
« Daech, ce sont les ténèbres mais la musique, c’est la lumière », lance-t-elle.
Fondée il y a 2000 ans, Palmyre était une oasis caravanière qui tomba sous le contrôle romain dans la première moitié du Ier siècle et fut rattachée à la province romaine de Syrie.
La ville devint une cité prospère sur la route reliant l’Empire romain à la la Perse, l’Inde et la Chine, grâce au commerce d’épices et de parfums, de la soie et de l’ivoire de l’est, des statues et du travail du verre de Phénicie.
Ses temples magnifiques, ses tombes au style unique et ses allées de colonnades attiraient 150.000 touristes un an avant la début du conflit syrien.
Maintenant, l’inventaire de ce qu’ont subi les monuments a été confié à Wael al-Hafyan, un responsable du département des Antiquités de la province de Homs.
Ce quadragénaire arpente désormais le site, examine avec attention chaque pièce antique et note le tout sur petit carnet.
« Notre estimation préliminaire est que les nouvelles destructions sont limitées à la façade du théâtre, son abside, ainsi qu’à l’explosion du tétrapyle, assure-t-il à l’AFP.
Mais il s’effondre en larmes quand il arrive au théâtre et au tétrapyle, un édifice de 16 colonnes érigé à la fin du IIIe siècle.
L’EI l’a réduit en janvier à un amas de pierre, un acte qualifié par l’ONU de « nouveau crime de guerre et d’immense perte pour le peuple syrien et l’humanité ».
« Quiconque possédant un iota d’humanité ne peut pas ne pas se sentir triste en les voyant. Je suis triste et je le resterai jusqu’à ce que Palmyre redevienne ce qu’elle fut », martèle-t-il.
Mais cet ingénieur reste optimiste et considère que Palmyre sera restaurée grâce à l’aide de l’Unesco.
Quand on lui demande de faire le point sur ce qu’il reste des trésors de Palmyre, Wael al-Hafyan se mord la lèvre et réfléchit.
« Tout Palmyre demeure. Son histoire demeure. Quelques éraflures ne peuvent pas dénaturer sa beauté. L’énormité de ce qu’a commis Daech, tous ses crimes, ne peuvent porter atteinte à la gloire de cette ville », assure-t-il.

Syrie: fin des discussions de Genève avec un « agenda clair »

Staffan de Mistura, à Genève, le 3 mars 2017 (Afp)

Les discussions de Genève ont pris fin avec l’acceptation par les belligérants syriens d’un « agenda clair » incluant la gouvernance et la lutte contre le terrorisme, et l’ONU prévoit un nouveau rendez-vous en mars.

Après un peu plus d’une semaine de discussions difficiles, l’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a fait vendredi soir le bilan de ce quatrième round de négociations.PUBLICITÉ »Le train est prêt, il est en gare, les moteurs chauffent. Tout est prêt, il a juste besoin d’un accélérateur », a déclaré M. de Mistura.

« Je crois que nous avons à présent un agenda clair devant nous », a indiqué l’émissaire. « Nous avons discuté de procédure, mais nous avons aussi discuté de substance », a-t-il dit.

Ce diplomate chevronné, dont l’optimisme chronique bute depuis près de trois ans sur le du conflit syrien, a prévu de se rendre la semaine prochaine au Conseil de sécurité de l’ONU à New York.

Ensuite, a-t-il dit, « nous aurons Astana (…) pour consolider le cessez-le-feu, et puis à nouveau Genève », en mars.

La Russie, alliée de Damas, et la Turquie, soutien des rebelles, parrainent en effet depuis fin décembre un processus parallèle de négociation à Astana (Kazakhstan), centré sur les questions militaires.

Si huit jours de discussions à Genève n’ont pas permis d’avancée majeure, de tous petits pas ont été accomplis, et aucun des belligérants n’a pris le risque de claquer la porte.

Le médiateur de l’ONU a enchaîné les rendez-vous avec toutes les parties: la délégation du régime, celle du Haut comité des négociations (HCN, principale délégation de l’opposition), et les opposants proches de la Russie, le « Groupe du Caire » et le « Groupe de Moscou ».

Les pourparlers n’ont en effet pas permis d’entamer des discussions directes entre les belligérants. Les deux parties se sont simplement fait face lors de la cérémonie d’ouverture jeudi dernier, dans une ambiance polaire.

A l’issue des négociations, Bachar al-Jaafari, l’austère chef de la délégation du régime, a quitté l’ONU sans s’adresser aux médias, tandis que le chef des négociateurs de l’opposition syrienne, Nasr al-Hariri, a jugé cette session « plus positive ».

Terrorisme et transition politique

Les discussions ont essentiellement porté sur des questions d’agenda mais ont permis, pour la première fois, d’obtenir un « agenda clair » en quatre points, selon Staffan de Mistura.

Le gouvernement avait insisté à plusieurs reprises ces derniers jours sur sa volonté d’ajouter la lutte contre le terrorisme aux trois autres éléments prévus par l’émissaire avant le début des négociations, à savoir la gouvernance – thème flou pour évoquer une transition politique -, la Constitution, et les élections. Il a obtenu gain de cause.

Ces quatre sujets seront discutés « en parallèle », a assuré l’envoyé spécial, mais les questions de stratégie contre le terrorisme seront discutées à Genève tandis que la partie opérationnelle de la lutte contre le terrorisme sera abordée à Astana.

Pression russe

Les pourparlers de Genève visent à mettre fin à la guerre en Syrie, qui a fait plus de 310.000 morts et des millions de réfugiés alors que le conflit va entrer le 15 mars dans sa septième année.

Trois sessions de discussions en 2016 s’étaient soldées par un échec, en raison des violences sur le terrain et de l’insistance du régime à parler de terrorisme, quand l’opposition réclamait des discussions sur une transition politique.

Mais les positions se sont nuancées, sous l’influence de l’acteur majeur du dossier, Moscou. Présent à Genève pour le Conseil des droits de l’Homme, le ministre adjoint des Affaires étrangères russes, Guennadi Gatilov, a rencontré la délégation du régime, et, fait sans précédent, celle du HCN.

La Russie intervient militairement en Syrie depuis septembre 2015 et a permis au régime du président Bachar al-Assad de se renforcer sur le terrain. Elle tire aussi les ficelles sur le plan politique, en l’absence des Etats-Unis, dont le président Donald Trump n’a donné jusqu’à présent aucun signe d’implication dans la recherche d’un règlement du conflit syrien.

Et les pressions russes semblent avoir payé, puisque pour la première fois le régime a annoncé publiquement à Genève qu’il était prêt à discuter des trois thèmes politiques fixés par M. De Mistura.

La pression de Moscou s’est exercé aussi sur l’opposition. Jeudi, la porte-parole de la diplomatie russe a accusé le HCN de « saboter » le processus de Genève, intimant implicitement à l’opposition d’intégrer en son sein les représentants des groupes du Caire et de Moscou.

Syrie: blocage généralisé, au Conseil de sécurité comme à Genève

L’émissaire de l’ONU Staffan de Mistura (cetre) lors des négociations sur la Syrie à Genève, le 28 février 2017 (Afp)

Le blocage est général autour du dossier syrien: au Conseil de sécurité, où Russie et Chine ont empêché des sanctions contre le régime de Damas, et à Genève, où les pourparlers de paix s’enlisent.

Le vote de mardi à l’ONU à New York, sur l’éventualité de sanctionner le régime syrien pour utilisation d’armes chimiques, a marqué le premier grand désaccord entre Washington et Moscou depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.
Le président russe Vladimir Poutine l’avait répété avant le vote: des sanctions contre le pouvoir syrien seraient « inopportunes » dans le contexte des pourparlers engagés à Genève sous l’égide de l’ONU. Et les actes ont suivi les paroles, avec le veto de la Russie mais aussi celui de la Chine et le vote négatif de la Bolivie face à neuf voix en faveur des sanctions et trois abstentions.
« C’est un triste jour pour le Conseil de sécurité quand les membres commencent à trouver des excuses à d’autres Etats membres qui tuent leur propre peuple », a réagi l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley.
Les Etats-Unis et la Russie sont chacun impliqués sur le terrain en Syrie, Washington à la tête d’une coalition internationale luttant contre le groupe jihadiste Etat islamique, la Russie en soutien de son allié le président syrien Bachar al-Assad.
Les Européens s’étaient montrés inquiets ces dernières semaines d’un éventuel changement de position radical des Etats-Unis vis-à-vis de la Russie. Mais sur le dossier syrien, Washington s’est donc de nouveau rangé du côté du Royaume-Uni et de la France.
Le ministre des Affaires étrangères français Jean-Marc Ayrault a accusé la Russie de porter « une lourde responsabilité vis-à-vis du peuple syrien et du reste de l’humanité ».
C’est la septième fois que Moscou utilise son veto pour protéger le régime de Bachar al-Assad face aux sanctions de l’ONU. La Chine a rejoint la Russie pour bloquer six de ces sept résolutions.
La nouvelle proposition de sanctions suivait une enquête conjointe menée par les Nations unies et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), qui avait conclu en octobre que le régime syrien avait mené au moins trois attaques avec des armes chimiques en 2014 et 2015.
Les enquêteurs avaient déterminé que les jihadistes du groupe Etat islamique avaient eux aussi utilisé du gaz moutarde en 2015.
La Syrie a toujours nié avoir utilisé des armes chimiques dans ce conflit qui a fait plus de 310.000 morts depuis 2011.
Mercredi, à 13h00 GMT, de nouvelles révélations pourraient intervenir sur les exactions dans les deux camps, avec les conclusions de la commission d’enquête de l’ONU sur les allégations de violations des droits de l’Homme à Alep entre juillet et décembre 2016.
Blocage à l’ONU donc, et blocage à Genève, où les négociations patinent depuis leur ouverture jeudi, butant sur des questions de procédures et sur le fossé immense entre les deux parties.
Si l’émissaire de l’ONU Staffan de Mistura enchaîne les rencontres bilatérales avec les délégations syriennes, la perspective de négociations directes entre belligérants apparaît toujours très éloignée. Vladimir Poutine a fait allusion à ces difficultés mardi, reconnaissant depuis le Kirghizstan que « tout ne se passe pas aussi facilement qu’on le voudrait ».
Les discussions achoppent notamment sur la volonté de la Russie de faire de la lutte contre le terrorisme une priorité à l’agenda, ce qui pourrait aliéner certains groupes d’opposition ayant des liens avec des combattants islamistes.
Le régime syrien « n’est pas contre l’agenda proposé, mais il dit aussi que la question du terrorisme ne peut pas être ignorée », a insisté le ministre adjoint des Affaires étrangères russe, Guennadi Gatilov, qui doit rencontrer la délégation de l’opposition ce mercredi.
Ecarté de ces négociations de Genève, comme le groupe Etat islamique, l’ex-branche syrienne d’Al-Qaïda ne compte pas renoncer à combattre militairement le régime de Damas.
Dans une rare vidéo, le chef de Fateh al-Cham a revendiqué une nouvelle fois les attaques qui ont tué des dizaines de personnes samedi à Homs, dont un proche du président Bachar al-Assad.
« Le régime ne comprend que le langage de la force et du sang », a déclaré Abou Mohammad al-Jolani, estimant que les « politiciens (présents à Genève) offrent au régime une victoire sans combat ». Et d’avertir que ces attaques « ne sont qu’une étape dans une série qui va se poursuivre ».
Al-Qaïda était également au coeur des préoccupations mardi aux Etats-Unis où, selon un responsable anonyme, les agences de renseignement sont mobilisées pour confirmer la mort en Syrie du numéro 2 d’Al Qaïda, Abou Kheir al-Masri.
Sa mort, si elle est confirmée, appellera « presque certainement » une riposte des jihadistes, « depuis la Syrie ou autre part dans le monde », a commenté Charles Lister, du Middle East Institute, un centre de recherche basé à Washington.

(01-03-2017 – avec les agences de presse)

 

Syrie: Les attentats fragilisent le processus de paix à Genève

Syrie: Les pourparlers de Genève pour tenter d’amorcer un règlement politique au conflit syrien apparaissent comme plus fragiles que jamais, au lendemain d’un attentat meurtrier contre un symbole du pouvoir à Homs qui a replacé le « terrorisme » au coeur du débat.

Contrôle de sécurité à Homs en Syrie, le 25 février 2017 (Afp)

L’attentat contre les services de renseignement du régime, sans précédent depuis une attaque en 2012 à Damas, a fait entre 30 et 42 morts selon les sources, et tué un proche du président syrien Bachar al-Assad, le chef du renseignement militaire de Homs, Hassan Daaboul. L’attaque, perpétrée par plusieurs kamikazes, a été revendiquée par le groupe Fateh al-Cham, l’ex-branche syrienne d’Al-Qaïda.
Immédiatement, l’ONU s’est inquiétée d’une tentative de faire « dérailler » les négociations de Genève.
« A chaque fois que nous avons des pourparlers, il y a toujours quelqu’un qui essaye de faire dérailler le processus. Nous nous y attendions », a déclaré l’émissaire de l’ONU Staffan de Mistura.
Mais la réaction la plus forte est venue de Damas, qui a promis de ne pas laisser cet attentat impuni, et estimé, par la voix de son représentant aux négociations de Genève, que l’attentat envoyait un « message clair ».
Dans une conférence de presse particulièrement offensive après avoir rencontré M. de Mistura, le chef de la délégation du régime, Bachar al-Jaafari, a sommé l’ONU et surtout l’opposition de condamner clairement les attaques de Homs.
« Aujourd’hui, nous attendons de l’opposition qu’elle condamne le terrorisme », a martelé M. Jaafari, ajoutant que Damas considérerait comme « complice » toute partie refusant de condamner l’attentat.
« Ce qui s’est passé aujourd’hui a jeté une ombre sur les pourparlers de Genève », a-t-il poursuivi, même s’il a nié vouloir lier la poursuite des pourparlers à la condamnation des attentats par l’opposition.
« La priorité numéro un à Genève est de discuter du terrorisme », a-t-il répété à plusieurs reprises.
L’opposition, qui s’est exprimée dans la foulée lors d’une conférence de presse, a condamné « le terrorisme », mais sans mentionner explicitement Homs.
« Notre position est claire, nous condamnons le terrorisme et les terroristes, nous condamnons Daech (acronyme arabe du groupe Etat islamique) et Al Nosra (ex-branche syrienne d’Al-Qaïda) », a déclaré le chef de la délégation du Haut comité des Négociations (HCN, opposition), Nasr al-Hariri.
Interrogé pour savoir s’il parlait de Homs, il a répondu: « Nous condamnons toutes les opérations terroristes, et si ce qui s’est passé à Homs est une opération terroriste, alors mes déclarations sont claires ».
Un autre membre de la délégation du Haut comité des négociations (HCN, opposition), Fateh Hassoun, représentant d’un groupe armé, a lui accusé implicitement Damas d’avoir facilité l’attentat pour servir ses objectifs.
L’attentat de Homs, tout comme les 13 civils tués par des frappes aériennes du régime à travers le pays samedi, selon les chiffres de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), sont venus fragiliser des discussions de paix déjà singulièrement mal engagées.
Les négociations de Genève engagées jeudi font suite à trois précédentes sessions en 2016. A chaque fois elles avaient échoué, victimes de la reprise de la violence sur le terrain et du fossé entre les belligérants. Et comme samedi, Damas répétait à l’époque que sa priorité était de « lutter contre le terrorisme », quand l’opposition réclamait des négociations sur une transition politique.
Aucune avancée n’a été enregistrée depuis la cérémonie d’ouverture jeudi où les deux délégations se sont fait face à face dans une ambiance tendue. M. de Mistura a multiplié les bilatérales, mais les discussions s’enlisent dans des questions de procédure.
« Nous avons exclusivement parlé de questions relatives au format des discussions », avait ainsi déclaré M. Jaafari vendredi.
Censées aborder sur le fond la question d’un règlement politique du conflit, les discussions se retrouvent de nouveau dominées par la question du « terrorisme ».
Les attaques de Homs se sont produites au lendemain d’un autre jour sanglant en Syrie vendredi, où des attentats revendiqués par le groupe jihadiste Etat islamique (EI) ont fait 83 morts, dont 45 civils, près d’Al-Bab dans le nord du pays.
Comme Fateh al-Cham, l’EI est exclu des négociations et du cessez-le-feu parrainé par la Russie, alliée de Damas, et la Turquie, qui soutient les rebelles.
Ce cessez-le-feu, entré en vigueur le 30 décembre, est censé concerner uniquement le régime de Damas et l’opposition non jihadiste, mais il est régulièrement violé.
Cette violence générale illustre la fragilité de toute « normalisation » dans un pays ravagé par six ans de guerre, où interviennent des acteurs multiples aux agendas différents. La guerre en Syrie a fait plus de 300.000 morts et des millions de réfugiés.

(26-02-2017 – avec les agences de presse)

Qatar-Russie : une lune de miel énergétique à l’ombre de la crise syrienne

Qatar-Russie : une lune de miel énergétique à l’ombre de la crise syrienne

Publié le par Caroline Galactéros  Administrateur de l’AFS, suivez ses articles sur son blog: Bouger les lignes  http://galacteros.over-blog.com

L'émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al Thani, et le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine.

L’émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al Thani, et le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine.

Il est parfois des couples improbables et discrets qui se forment à l’abri du tumulte du monde, sur la base d’intérêts tactiques bien compris voire de long terme. Ainsi en va -t-il de la Russie et du Qatar. L’idylle est aujourd’hui de nature d’abord énergétique, mais pourrait toucher demain l’industrie et la coopération militaires. A première vue, tout donne l’impression que la Russie sépare de manière étanche sa politique économique de sa politique diplomatique, dans la mesure où le Qatar et la Russie sont officiellement opposés sur le dossier syrien (le Qatar soutenant les Frères musulmans en Syrie, notamment le groupe Ahrar Al-Sham, quand la Russie défend mordicus le régime syrien alaouite, membre de l’axe chiite). Le présent article tend à montrer la complexité et les nuances qui viennent tempérer cette doxa et démontrent qu’il n’y a pas de réel hiatus entre la politique économique et la politique étrangère de Moscou mais une manœuvre stratégique fort habile, qui voit et vise loin.

Rosneft, Novatek, accord de coopération militaire … une corbeille de la mariée richement dotée

Quelques points de chronologie d’abord. Le 20 février, l’ambassadeur de Russie au Qatar, Nurmakhmad Kholov, a annoncé à l’agence russe Tass que « le Qatar investissait près de 2 milliards de dollars dans les activités de l’entreprise russe Novatek, plus important producteur indépendant de gaz de Russie ». Kholov a précisé que « la Russie et le Qatar ont réussi ces trois dernières années à obtenir de bons résultats en matière d’économie et d’échanges commerciaux grâce au travail conjoint de la commission intergouvernementale pour le commerce, l’économie, la science et la coopération technique » entre les deux pays. Avant de conclure : «Le Qatar exprime un grand intérêt pour les produits agricoles russes ainsi que pour les projets russes en matière de pétrochimie et de sources énergétiques, autant que dans le domaine de la construction ».

Ceci est dans la droite ligne de la privatisation du géant public russe du pétrole, Rosneft, qui a eu lieu au début du mois de décembre dernier. L’Etat russe qui possédait 50% de Rosneft, première entreprise pétrolière mondiale, en a cédé 19,5% du capital au fonds d’investissement Glencore ainsi qu’au fonds souverain du Qatar (dans une proportion que l’on ignore) pour un montant de 10,5 milliards de dollars, qui doivent servir au renflouement du budget russe vial’entreprise publique Rosneftegaz. Précisons que le Qatar est lui-même majoritaire au sein du fonds Glencore.

Précisions enfin, pour illustrer cette « lune de miel » qu’au delà de l’énergie, un embryon de coopération militaire existe entre les deux pays. Le 6 septembre 2016, Moscou et Doha ont en effet signé un accord militaire après une visite du ministre qatari de la Défense, Khalid bin Mohammad Al Attiyah à son homologue russe Sergueï Choïgou, lors du Forum international militaire et technique de Moscou « ARMÉE-2016 ». Cet accord faisait suite à la rencontre, en mai de la même année, du vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov avec l’émir Tamim ben Hamad al-Thanin. « Nous avons signé un accord de coopération militaire avec la Russie, mais il ne comprend pas l’achat d’armes », a indiqué Saoud Bin Abdallah al-Mahmoud, Ambassadeur du Qatar à Moscou. Comme l’explique le site Opex360, « s’agissant d’éventuels contrats d’armement, rien n’est fermé du côté de Doha, le diplomate ayant assuré que son gouvernement examinerait cette ‘possibilité’ ». Dans ce nouveau contexte marqué par les progrès en matière de coopération énergétique, il n’est pas à exclure que des armes russes soient vendues au Qatar dans les deux ans, d’autant plus qu’elles ont, au grand dam de Doha, démontré toute leur efficacité en Syrie et que Moscou engrange déjà de précieux contrats d’armement dans la région (nous ferons un point d’ici peu sur ces contrats tous azimuts).

Une vieille discorde entre la Russie et le Qatar, aggravée par la crise syrienne

Le passif entre Moscou et Doha est pourtant ancien. La Tchétchénie fut un premier motif de discorde. Au commencement de la décennie 2000, le Tchétchène Zelimkhan Iandarbiev, alors au Qatar, était accusé par la Russie de financer des rebelles tchétchènes liés à Al-Qaïda et d’avoir participé à l’organisation de la prise d’otages dans un théâtre moscovite en octobre 2002 qui s’était soldée par 129 morts. Mais Doha a refusé à la Russie son extradition. En février 2004, toujours en exil à Doha, Zelimkhan Iandarbiev trépassa après qu’une bombe placée dans sa voiture eut explosé. Comme l’explique le site Opex360, « les services russes (SVR et GRU) furent accusés d’avoir commis cet assassinat, qui sera, plus tard, à l’origine de la première loi anti-terroriste adoptée par l’Emirat. En tout cas, deux suspects de nationalité russe appartenant effectivement au GRU furent interpellés et jugés à Doha pour assassinat et trafic d’armes. Après avoir été torturés selon Moscou, les deux hommes furent condamnés à la prison à vie, avant d’être finalement transférés en Russie pour y accomplir leur peine. On y a perdu leur trace ».

La relation russo-quatarie se dégrade brutalement dès le début de la Guerre civile syrienne en 2011. Alors que la Russie joue des circonstances pour consolider son alliance avec le régime syrien (pour ne pas laisser les mains libres à Téhéran), et vole ouvertement à son secours en septembre 2015 en intervenant militairement (une première pour Moscou depuis l’invasion de l’Afghanistan en 1979), le Qatar, proche des Frères musulmans, est en fait dès le début de la Guerre syrienne à la manœuvre pour faire tomber le régime de Bachar al-Assad et installer, en coopération avec les Turcs – eux aussi très liés aux Frères musulmans – et en concurrence avec les wahhabites d’Arabie Saoudite, un régime sunnite à Damas sous la forme d’un “Etat islamique”. Les Frères musulmans financent et arment les rebelles syriens (moins le Front al-Nosra, émanation wahhabite d’Al-Qaïda, qu’Ahrar al-Sham et la coalition du Front islamique, dominés par les Frères musulmans et parrainés par Doha et Ankara).

En 2012, alors que les Occidentaux pensent que le régime de Bachar al-Assad va tomber en quelques semaines, le ministre qatari des Affaires étrangères Hamed Ibn Jassem aurait déclaré à l’ambassadeur russe auprès des Nations Unies : « Je vous mets en garde contre toute utilisation du veto sur la crise en Syrie; la Russie doit approuver la résolution, sinon elle perdra tous les pays arabes ». Mais l’intéressé, Vitali Tchourkine, qui vient de décéder brutalement, aurait alors rétorqué au Qatari : « Si vous me reparliez sur ce ton de nouveau, il n’y aurait plus une chose qui s’appelle le Qatar » avant de lancer directement au Premier ministre du Qatar : «Vous êtes ici au Conseil de sécurité en tant qu’invité, respectez-vous et reprenez votre taille initiale, d’ailleurs je ne m’adresserai plus à vous, je parle au nom de la grande Russie, et qu’avec les Grands ». Ces propos peu diplomatiques ont été bien sûr démentis par la Fédération de Russie, mais ils illustrent bien les certitudes de l’époque : les puissances sunnites du Moyen-Orient, fortes de leurs soutiens occidentaux, pensent alors réellement pouvoir parvenir à leurs fins en profitant des « Printemps arabes » pour écarter le très gênant Assad tandis que les Russes, cherchant à rattraper l’humiliation endurée en Libye – où ils n’ont pu empêcher les Occidentaux d’outrepasser leur mandat initial pour provoquer la chute du régime libyen et la fin terrifiante du Colonel Kadhafi -, se promettent alors de ne plus rien céder aux Occidentaux ou à leurs alliés du Golfe, tant sur le terrain diplomatique, en dégainant leur veto au Conseil de Sécurité que sur le terrain militaire, en volant directement à la rescousse d’Al-Assad dans sa guerre contre-insurrectionnelle l’opposant aux « rebelles » syriens.

Sur fond de crise syrienne, mais aussi de guerre du pétrole et du gaz, il faut donc convenir qu’aujourd’hui, en concluant ces accords avec Moscou, le Qatar, à l’instar de la Turquie l’été dernier, prend acte de la domination stratégique russe sur la région et « va à Canossa », tandis que Moscou consolide son approche diplomatique éminemment pragmatique et basée sur du « win-win » consistant à parler à tous – même à ses adversaires voire à ses ennemis – et à trouver avec chacun des bases d’accord diversifiées permettant d’exercer un effet de levier sur d’autres partenaires-concurrents (en l’espèce sur Téhéran qui ne peut que s’inquiéter fortement de l’actuel rapprochement Moscou-Doha)

La prophétie qatarie, partagée à l’époque par bien des analystes occidentaux – « vous allez voir, en protégeant Bachar al-Assad, les Russes vont se mettre à dos tous les pays de la région, particulièrement les puissances sunnites, et ils s’enliseront en Syrie comme les Soviétiques (ou les Américains…) en Afghanistan » – ne s’est pas révélée exacte. Contrairement à la France, qui, seule contre tous, semble encore vouloir pousser en Syrie les rebelles contre le régime – il faut lire la passionnante enquête de Georges Malbrunot du Figaro sur ce point –, les Qataris, comme les Turcs, ont pris acte de leur échec pour déstabiliser le régime de Bachar al-Assad et souhaitent désormais exercer leur influence autrement sur la région. Si le processus d’Astana n’a pas encore porté ses fruits politiques, il y a fort à parier que les Turcs, mais aussi les puissances du Golfe, font tout pour disposer en Syrie d’une zone d’influence qui comporte la région d’Idleb (aujourd’hui aux mains des rebelles, essentiellement djihadistes) mais aussi la région de l’extrême Nord du pays, symbolisée par la ville d’Al-Bab, récemment reprise à l’Etat islamique, où l’Armée turque aidée des rebelles syriens occupe, dans le cadre de l’opération « Bouclier de l’Euphrate », un espace stratégique et pourrait souhaiter s’étendre plus au sud vers Raqqa, moins au détriment du régime syrien (les Russes n’accepteraient pas) qu’au détriment des Kurdes du PYD, qui servent encore une fois, dans l’histoire du Levant, de variable d’ajustement régionale à l’usage des Russes comme des Américains… Une telle influence sunnite en Syrie ne gênerait d’ailleurs pas Moscou qui, contrairement à Damas ou Téhéran, ne souhaite pas un contrôle unitaire de l’ensemble de la Syrie. La Russie pourrait se satisfaire d’une solution fédérale avec une Syrie utile alaouite protégeant les intérêts stratégiques russes (base navale de Tartous et aérienne de Hmeimim).

Pour comprendre les raisonnements russe, turc et qatari, il faut s’intéresser aux enjeux gaziers et pétroliers. Non que la Syrie soit un producteur important d’hydrocarbures. Les réserves onshore au Nord et à l’Est du pays n’ont rien d’exceptionnel. Quant aux possibles réserves off-shore, elles se situent au large de Lattaquié, sous contrôle des Alaouites : les sociétés russes placent déjà leurs pions pour les exploiter ultérieurement. L’enjeu est moins dans la production d’hydrocarbures que dans le transport d’hydrocarbures des riches régions du Moyen-Orient (Iran, Qatar, Arabie Saoudite) vers l’Europe. Pour le dire en une phrase, les puissances sunnites, en s’alliant aux Occidentaux, pensaient pouvoir doubler les Russes dans l’approvisionnement en hydrocarbures du Sud de l’Europe avec la Turquie servant de « hub » énergétique à cette opération d’envergure. Une Syrie sous contrôle sunnite aurait facilité un tel projet… et introduit une sévère concurrence pour les Russes sur le marché européen des hydrocarbures. Mais ce rêve sunnite a vécu. Le 9 août dernier, le président turc Recep Erdogan qui, pour asseoir son pouvoir autocratique, a besoin de l’influence russe pour contrebalancer celle des Américains, est lui aussi « allé à Canossa » en rencontrant Poutine à Saint-Pétersbourg (cf. l’excellente analyse de Jean-François Colosimo dans une interview au Figaro). Le lendemain, Vladimir Poutine se rendait à Istanbul et les deux présidents relançaient le projet de gazoduc « Turkish Stream », qui permet aux Russes de passer par la Turquie (et de contourner l’Ukraine !) pour vendre du gaz à l’Europe via le sud du continent. En investissant dans Rosneft et dans Novatek, les Qataris comprennent à leur tour qu’ils ne peuvent avoir sérieusement accès au marché européen sans l’aval de Moscou. Une aubaine financière pour le président russe friant de l’argent qatari pour assainir ses finances publiques et réduire le déficit public du pays (même si la dette publique russe n’atteint que 20% du PIB quand la nôtre frôle les 100%…).

Je prends la liberté de citer longuement le Général (2S) Jean-Bernard Pinatel qui résume parfaitement, dans Atlantico, la nouvelle donne géostratégique : « Trois pays – la Russie, l’Iran et le Qatar – possèdent 50% des réserves mondiales de gaz naturel. Les trois sont désormais alliés économiquement et stratégiquement, ce qui marque l’échec de la stratégie de l’Union européenne de diversification de ses sources d’approvisionnement de gaz naturel inspirée et voulue par les Etats-Unis et l’Otan. En effet, la Russie est déjà le premier fournisseur de l’Union européenne avec 40% des importations, qui représentent 20% de la consommation totale de gaz de l’Union européenne. Compte tenu de la hausse de la consommation dans l’Union européenne et de l’épuisement du gisement gazier en Mer du Nord, cette dépendance énergétique de l’UE vis-à-vis de la Russie devrait fortement s’accroître dans les prochaines années. La Commission européenne estimait en effet que, d’ici 2040, 70% des besoins énergétiques de l’UE devraient être assurés par les importations, contre 50% aujourd’hui. Cette dépendance était inacceptable pour les stratèges américains pour lesquels la création d’une Eurasie annoncerait la fin de leur suprématie mondiale et l’arrivée d’un troisième grand acteur sur la scène mondiale qui perturberait leur tête-à-tête d’adversaire-partenaire avec la Chine.Pour les stratèges américains et les atlantistes européens, le Qatar, avec 24300 milliards de m3 de réserves prouvées qui lui assurent 154 ans de production au rythme actuel, était la solution. A condition toutefois de construire un gazoduc, car la liquéfaction et le transport en bateau via le détroit d’Ormuz et le canal de Suez rendaient le gaz qatari non concurrentiel avec le gaz russe. Selon des informations du journal libanais Al-Akhbar publiées en 2012, les Qataris avaient établi un plan, approuvé par l’administration Obama et l’UE visant à construire un gazoduc vers l’Europe via la Syrie. Ce gazoduc terrestre aurait traversé l’Arabie Saoudite, puis la Jordanie, en évitant l’Irak pour arriver à Homs en Syrie, d’où il aurait bifurqué dans trois directions : Lattaquié sur la côte syrienne, Tripoli au nord du Liban, et une troisième branche via la Turquie vers l’Europe. Mais Bachar El-Assad refusait d’autoriser ce transit ».

J’avais moi-même publié un article dans la Revue des Affaires sur les enjeux énergétiques de la Guerre de Syrie. Ce que j’entrevoyais commence de se réaliser et nous voyons les prémisses d’une politique énergétique moyen-orientale directement pilotée par Moscou. Alors qu’avant 2011, deux projets de gazoducs entraient en concurrence – un “tracé chiite” permettant d’exporter le gaz iranien via la Syrie et un “gazoduc sunnite” permettant d’exporter le gaz qatari via la Turquie – la Russie a joué un jeu à la fois ferme (via ses Soukhoï…) et souple (en ne fermant pas la voie d’une influence sunnite dans une future Syrie fédérale) de sorte à devenir le pivot central et l’honest broker du Levant pour que le gaz tant iranien que qatari transite vers l’Europe sans déposséder Moscou via le futur gazoduc russo-turc Turkish Stream, la Syrie marquant dans ce périple gazier une étape essentielle.

La Russie, acteur régional et global de coordination et de médiation.

Quid de la suite ? Tandis que la Guerre de Syrie commence de se stabiliser avec une zone chiite formée par la Syrie utile et une percée vers l’Est à Deir Ezzor, une zone sunnite et une zone kurde servant de levier à l’influence croisée américano-russe, des compromis politiques pourraient être trouvés peu à peu à Astana où les véritables négociations de paix devraient supplanter celles de Genève sur le fond du dossier. Dans le même temps, une coordination des différents acteurs régionaux (Iran, Turquie, Qatar, Arabie Saoudite) se matérialise sous les auspices de la Russie qui, négocie parallèlement son action à un niveau supérieur de gouvernance avec les Etats-Unis, eux-mêmes désireux de conserver leur « leadership from behind » – en matière de non-interventionnisme, Trump pourrait paradoxalement agir en continuité avec la politique de B. Obama -, et avec la Chine qui, elle, devrait jouer à l’avenir un rôle essentiel au Moyen-Orient via son projet de « Nouvelle route de la Soie ». Un projet pharaonique qui constitue l’armature de ce que je nommerai le « pivot vers l’Ouest » chinois en miroir du « pivot vers l’Est » américain.

En-deça de de ce “grand jeu” stratégique, les yeux du tacticien Poutine se tournent vers la Libye où la Russie déploie discrètement son jeu diplomatique et là encore énergétique. Alors que le désormais Maréchal Haftar, maître de la Cyrénaïque et concurrent du soi-disant « gouvernement d’Union nationale » qui règne sur la Tripolitaine, a pu faire main-basse sur les installations pétrolières du Golfe de Syrte, on apprend que Rosneft passera un accord avec laNational Oil Corporation libyenne dont le PDG, Mustafa Sanalla, a rencontré Igor Sechin, son homologue de Rosneft, à Londres lors de la Conférence internationale de l’énergie le 20 février dernier. Un “signal faible” intéressant dont je vous conterai les tenants et les aboutissants prévisibles d’ici peu…

Quelle place pour la France dans le conflit syrien au lendemain de la chute d’ALEP?

Gérard Bapt, Président du Groupe d’Amitié France Syrie a eu l’obligeance de communiquer à l’Association d’Amitié France Syrie (AFS) une intéressante analyse du Centre d’Analyse, de Prévision et de Stratégie (CAPS) près le Ministère des Affaires étrangères pour tenter de répondre à la question: Quelle place pour la France dans le conflit syrien au lendemain de la chute d’ALEP?

Note du CAPS Affaires Etrangères du 3 janvier 2017

Nous nous permettons dans un soucis d’objectivité de dire d’ALEP-Est, ce qui n’est pas la même chose puisque la plus grande partie et la plus peuplée est à ALEP-Ouest.

L’Association d’Amitié France Syrie qui s’efforce de respecter son engagement de neutralité peut toutefois se caractériser par une analyse critique et équilibrée des positions exprimées par les différents groupes de réflexion sur la Syrie.

C’est la raison pour laquelle nous publions également une note de commentaires et en réponse de Fabrice Balanche à cette note du CAPS.

Fabrice Balanche-Les analyses désastreuses du CAPS sur la Syrie

Chacun pourra ainsi se faire sa propre opinion sur ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire.

En tout état de cause pour une Association comme la nôtre, qui a pour objet de développer par tous les moyens l’amitié entre la France et la Syrie, il nous apparaissait essentiel de mettre en perspective ces analyses stratégiques sachant qu’au delà des aspects de haute politique géostratégique, il faut rappeler au Gouvernement Français que la population syrienne continue à souffrir après 6 ans de guerre et qu’elle ne saurait, quelque que soit sa position pro ou anti régime, continuer à être l’otage des enjeux politiques internationaux ou régionaux. Il est du devoir éthique de la communauté internationale d’arrêter les sanctions envers la Syrie donc envers les syriens et nous pensons que Madame Mogherini la Haute Représentante de l’Union Européenne a raison de plaider pour lancer une aide importante de l’Europe pour la reconstruction de la Syrie ce qui passe par un rétablissement des relations diplomatique avec Damas.

Des combattantes syriennes défient l’Etat-Islamique pour la reconquête de Raqa

Près de Raqa, des combattantes arabes défient l’EI et les traditions

PRÈS D’AL-TORCHANE (SYRIE) (AFP)
Une combattante arabe syrienne contre l’EI près de Raqa, en Syrie, le 6 février 2017 – AFP

Elles combattent la plus redoutable organisation jihadiste au monde, mais en suivant l’exemple de leur cons?urs kurdes, les centaines de guerrières arabes en Syrie doivent également braver le courroux de leur famille et le poids des traditions.

A 20 km de Raqa (nord), « capitale » du groupe ultraradical Etat islamique (EI) qu’une alliance arabo-kurde veut conquérir, Batoul, 21 ans, défend sa cause avec ferveur, derrière des digues de sable.

« J’ai bravé mon clan, mon père, ma mère. Maintenant je brave l’ennemi », affirme la jeune femme portant un gilet à munitions et au cou, un foulard fleuri de couleur bordeaux.

« Mes parents m’ont dit +tu abandonnes les armes ou te renies+ », raconte-t-elle. Depuis, ils ne lui ont plus adressé la parole.

AFP

Des combattantes arabes syriennes contre l’EI près de Raqa, en Syrie, le 6 février 2017

A la différence des combattantes kurdes qui, à l’instar des hommes, portent depuis longtemps les armes, l’engagement militaire des femmes arabes en Syrie sort de l’ordinaire et est mal vu par leur entourage familial.

Batoul, issue des Al-Charabyé, l’un des clans conservateurs les plus connus du nord-est syrien, se décrit comme une rebelle.

« Je portais le voile et mon père nous obligeait à prier devant lui, je refusais cela », dit-elle, la tête nue.

Elle se trouve avec ses compagnes d’armes en plein désert, près du village d’Al-Torchane aux mains de l’EI dans le nord-est de la province de Raqa en majorité tenue par les jihadistes.

– « Libérer la femme » –

« J’ai rejoint les YPJ pour libérer la patrie mais aussi libérer la femme de l’esclavage. Il ne faut plus qu’on reste cloîtrée entre quatre murs », ajoute Batoul, en référence aux « Unités de protection de la femme », l’équivalent féminin des forces kurdes masculines des YPG.

AFP

Des combattantes syriennes près de Raqa, en Syrie, le 6 février 2017

Combattants arabes et kurdes sont alliés sous la bannière des Forces démocratiques syriennes (FDS) qui luttent contre l’EI depuis fin 2015 avec le soutien de la coalition internationale dirigée par Washington.

Depuis les positions des combattantes arabes, on voit une épaisse fumée se dégager d’Al-Torchane, cible des raids des avions de la coalition et des tirs d’obus.

Batoul a rejoint les YPJ il y a deux ans mais c’est son premier combat contre l’EI, dans le cadre de l’offensive lancée par les FDS en novembre.

« La première fois que j’ai tenu une arme, j’ai eu terriblement peur », reconnaît-elle. « Désormais, mon arme fait partie de moi-même. Elle me libère et me protège ».

AFP

Des combattantes arabes syriennes près de Raqa, en Syrie, le 6 février 2017

Elle s’exprime en arabe mais ses propos sont entrecoupés de mots en kurde qu’elle a appris en côtoyant ses s?urs d’armes.

Les Kurdes en Syrie se targuent de mettre en avant l’égalité entre hommes et femmes, notamment en zone de combat.

D’après la porte-parole de l’offensive, la kurde Jihan Cheikh Ahmad, le nombre de combattantes arabes ayant rejoint les FDS s’élève actuellement à plus de 1.000. Les victoires remportées contre l’EI les ont encouragées à se rallier aux FDS.

– ‘Mêmes droits’ –

Près du front, sous une tente, six jeunes femmes blaguent et échangent des confidences en sirotant du thé.

« Mon but est de libérer la femme de l’oppression de Daech (acronyme en arabe de l’EI) mais aussi de l’oppression de la société », affirme Hevi Dilirin, souriante, vêtue d’une veste treillis et de baskets gris et blancs.

AFP

Des combattantes syriennes arabes près de Raqa, en Syrie, le 6 février 2017

« Chez nous, les femmes n’ont pas leur mot à dire. Elles doivent avoir les mêmes droits que les hommes », martèle la jeune femme qui a adopté un nom de guerre kurde après avoir rejoint les YPJ en 2015.

Sa s?ur d’armes Doza Jiyan, 21 ans, les cheveux bruns attachés en arrière, assure que la majorité des familles arabes acceptent « difficilement » qu’une femme participe aux combats.

« Dans notre société syrienne, on trouve bizarre qu’une femme prenne les armes », affirme la combattante aux sourcils épais, originaire de la ville Ras al-Aïn (nord-est).

« L’EI n’est plus invincible, (les jihadistes) ne se battent plus qu’à bord de motos et se contentent de miner les villages », ajoute-t-elle, en discutant avec ses compagnons masculins de la situation sur le terrain.

Cette tactique ralentit l’avancée des FDS qui se trouvent depuis un mois à 20 km de la ville de Raqa.

Doza Jiyan est confiante que les mentalités sur les femmes au combat changeront avec les futurs succès face aux jihadistes. « Je suis très heureuse ici », dit-elle, avec le sourire.

Reprise de la région de Wadi Barada après celle d’ALEP-EST

Interview de Fabrice Balanche à l’AFP version originale en anglais

Les forces loyales au président Bachar al-Assad ont porté un nouveau coup au mouvement rebelle syrien, reprenant le contrôle d’un secteur stratégique près de Damas le week-end. La reprise de la région de Wadi Barada est un autre revers pour les rebelles après la perte de la deuxième ville d’Alep-Est en décembre 2016, le plus gros coup infligé à l’opposition depuis que le conflit a commencé avec des manifestations anti-gouvernementales en mars 2011.

  1. Que s’est-il passé à Wadi Barada?

R: Les forces gouvernementales syriennes ont repris dimanche Wadi Barada à l’extérieur de Damas, après un accord qui a permis à des centaines de rebelles de partir pour la province d’Idlib, située dans le nord de la Syrie.

Wadi Barada est la principale source d’eau de la capitale, et le gouvernement a accusé les rebelles de délibérément cesser les approvisionnements depuis le 22 décembre, laissant 5,5 millions de personnes sans eau. Les rebelles ont déclaré que les attaques gouvernementales avaient endommagé les infrastructures de pompage. Mais ils ont finalement accepté un accord qui a vu 700 rebelles et 1400 civils quitter Wadi Barada pour Idlib, selon l’Observatoire syrien pour les droits de l’homme. Au cours de ces derniers mois, le gouvernement a lancé des accords semblables de rapprochement dans au moins six autres régions de la capitale. “Le mouvement rebelle a définitivement perdu Damas”, a déclaré Fabrice Balanche, analyste au Washington Institute pour la Politique du Proche-Orient. Il a déclaré à l’AFP que l’armée syrienne et ses milices alliées – comme le mouvement libanais Hezbollah – ont méthodiquement repris les villes tenues par les rebelles autour de la capitale depuis 2013. “Les rebelles les plus rationnels cherchent un moyen de négocier une amnistie avec le gouvernement syrien. Pour d’autres, leur seul espoir est d’être transférés à Idlib”, a déclaré M. Balanche.

Q: Qu’est-ce qu’il reste aux rebelles?

R: Presque six ans après le soulèvement de la Syrie, bon nombre des plus importantes conquêtes des mouvements d’opposition ont été annulées. Ils ont perdu une grande partie du territoire qu’ils avaient conquis autour de Damas, et ont subi leur plus grande défaite encore en décembre 2016, lorsque les forces gouvernementales ont pris le contrôle complet d’Alep-Est. Les rebelles ne détiennent plus que 13% du territoire syrien, selon Balanche, y compris sur la province d’Idlib, où l’ex-affilié à Al-Qaïda, le Front Al Nosra devenu le Fatah al-Sham , domine. Ailleurs, l’opposition armée tient une partie de la région de .la Ghouta orientale près de Damas et certains territoires dans le centre et le sud de la Syrie. “En 2013, les attaques répétées des rebelles ont menacé le centre de Damas et les lignes de communication vers l’extérieur”, a déclaré M. Balanche à l’AFP. “Mais aujourd’hui, ils sont sur la défensive, divisés, encerclés et sans espoir de victoire”, a t-il dit. Le régime d’Assad avait essentiellement mené une guerre d’usure, a déclaré Fabrice Balanche, « comptant sur l’épuisement des communautés bombardées, assiégées et à la merci des groupes rebelles ». “Cela a pris plus de quatre ans, mais le régime peut se considérer victorieux, même s’il fait face à des poches de résistance.”

Q: Que se passe-t-il dans Idlib?

R: Le nord-ouest de la province d’Idlib, qui borde la Turquie, est le principal bastion pour les combattants affaiblis de l’opposition armée syrienne. Mais la province a été secouée par les combats de l’opposition pendant plus d’une semaine, alors que Fatah al-Sham combat ses anciens alliés rebelles. Aymenn al-Tamimi, un expert des mouvements djihadistes, a déclaré que les combats pourraient devenir une guerre existentielle que Fatah al-Sham ne serait pas prêt à perdre. Certains rebelles ont pris parti pour Fatah al-Sham, tandis que d’autres ont soutenu le puissant Ahrar al-Sham, qui était autrefois un allié clé de l’ancienne filiale d’Al-Qaïda. Compte tenu de ces divisions, l’armée syrienne et son principal soutien, Moscou, pourrait choisir le moment opportun pour lancer une attaque sur la province d’Idlib, a averti Fabrice Balanche. “Il s’agit d’une guerre au sein de l’insurrection,” opposant les membres de la ligne dure à ceux qui cherchent une solution politique au conflit, a-t-il dit. “Cela correspond à la stratégie de la Russie pour diviser et conquérir, avant de soutenir une offensive militaire contre la province d’Idlib”, a déclaré M. Balanche à l’AFP

Discours du Président Patrice Mouchon à l’AG de l’AFS

Discours du Président Patrice Mouchon à l’Assemblée Générale de l’AFS du 26 janvier 2017 et présentation de la conférence d’Antoine SFEIR .

 

Mesdames, Messieurs, Chers Amis,

Je réitère tous mes vœux pour cette année 2017, qu’elle vous soit bonne et profitable, ainsi qu’à vos familles.

Je veux également m’adresser, avec les membres du Conseil d’Administration qui m’entourent, et que je remercie pour leur disponibilité et l’excellence de leur travail, pour dire aux Syriens de Syrie combien nous pensons à eux.

Car ils continuent à souffrir dans toute la Syrie, ceux d’Alep qui ont subi les conséquences d’une guerre terrible.

Heureusement les canons se sont tus ainsi qu’à Damas qui continue à recevoir des obus de mortier et subir la guerre de l’eau.

Je tiens à citer les mots justes empreints d’une grande émotion de notre ami Samir Abdulac qui revient de Damas, et qui a retrouvé une ville appauvrie et en proie aux pénuries de la guerre.

Rendez-vous sur le site de la Direction Générale des Antiquités et des Musées de Syrie qui publie les photos des villes meurtries par la guerre.

La reprise de Palmyre par l’État islamique est tombée comme une douche froide alors que sa libération avait suscité un espoir.

Plus grave encore, notre amie Ségolène de Pontbriand a été la première à nous annoncer la destruction des tétrapiles et une partie du Théâtre Romain de Palmyre.

Nous avons légitimement posé la question de savoir comment l’aviation russe et celle de la coalition avaient pu laisser passer des colonnes de camions de l’État islamique entre Deir ez-Zor ou Raqqa et Palmyre.

Le patrimoine de l’Humanité est en train de disparaître à Palmyre.

Certains dans leurs commentaires nous exhortent à nous occuper des humains et non des vieilles pierres.

Or, comme vous le savez, nous faisons à l’Association les deux, mais nous avons toujours dit avec nos amis archéologues du Conseil d’Administration, Christiane Delplace et Pierre Leriche, qu’un peuple sans histoire, sans mémoire est un peuple errant qui risque de perdre son identité.

Mais rassurez-vous, il suffit d’écouter nos amis Syriens pour se rendre compte à quel point ils sont attachés à leur culture, à leur patrimoine qu’ils sauront défendre face à la barbarie.

En ce début d’année 2017, nous avons néanmoins une note d’espoir.

Je veux parler de la Conférence d’Astana du 24 janvier.

Elle a permis de rassembler l’opposition et les représentants du gouvernement syrien sous le patronage de la Russie, de l’Iran et de la Turquie.

Outre la garantie du cessez-le-feu, cette rencontre a ouvert la voie aux négociations qui auront lieu à Genève le 8 février prochain.

Dans la déclaration commune, il a été déclaré qu’il n’y avait aucune solution militaire au conflit syrien, qui ne peut être résolu qu’au travers d’un processus politique.

Staffan de Mistura, l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, a salué : « un évènement comme il n’y en avait jamais eu jusque-là » à l’occasion duquel « les représentants des groupes armées et le gouvernement syrien ont pu se parler ».

C’est ce que l’AFS n’a cessé de réclamer depuis le début de ce conflit.

Espérons que ce dialogue va se poursuivre et qu’une solution sera trouvée, mais tout cela est bien naturellement très fragile.

En tant qu’Association d’Amitié France-Syrie, nous déplorons que la France ne fasse pas partie de ces négociations.

Espérons qu’elle soit présente à Genève.

Car nous persistons à penser que la France a un rôle important à jouer.

L’amitié entre la France et la Syrie est très ancienne.

Elle fait partie des fondamentaux entre nos deux peuples, même si les Syriens de tous bords la critiquent d’une manière acerbe.

Au sein de l’AFS, nous continuons d’y croire, de croire qu’un esprit de médiation va continuer à souffler en Syrie et nous militons ardemment pour que le dialogue entre les Syriens s’amplifie et que la paix revienne.

Car nous ne nous y trompons pas, la Syrie au Moyen-Orient a toujours été un espace pluriculturel et pluriconfessionnel, représentant un modèle du vivre ensemble nourri de sa grande culture millénaire.

Ici à Paris et en France, l’AFS continuera à développer ces échanges, et le dialogue et, comme vous l’a annoncé notre ami Sami Chatila dans son rapport moral, nous allons lancer des rencontres dans des cafés pour permettre ce dialogue entre des personnes de bonne volonté qui vont s’appeler « carrefour de l’amitié franco-syrienne ». Nous vous y convions nombreux afin de faire vivre cette amitié.

Vive l’amitié franco-syrienne.

Je vous remercie de votre attention.

 

Restez tous en place car nous allons maintenant accueillir Monsieur Antoine Sfeir qui va donner une conférence sur le thème :

La crise syrienne : les conséquences géopolitiques.

Le modérateur de cette conférence sera notre amie Caroline Galactéros, Administrateur de l’AFS et Géopoliticienne et je coordonnerai le dialogue avec vous tous.