Caroline Galactéros: «Un nouveau partage du monde est en train de se structurer»

FIGAROVOX / GRAND ENTRETIEN – Le monde depuis 1989, puis 2001, est en constante restructuration. La géopolitologue Caroline Galactéros analyse la fin de l’utopie de la mondialisation heureuse, et regrette que la France et l’Europe ne développent pas davantage une stratégie de puissance.Par Entretien FigaroVox Publié le 9 novembre 2019 à 10:00, mis à jour le 12 novembre 2019 à 11:48

G7 le 26 août 2019 à Biarritz  -  BERTRAND GUAY/AFP
G7 le 26 août 2019 à Biarritz. BERTRAND GUAY/AFP

Docteur en sciences politiques, Caroline Galactéros est présidente du think tank Geopragma et dirige le cabinet d’intelligence stratégique PLANETING. Elle a notamment publié Vers un nouveau Yalta. Recueil de chroniques géopolitiques 2014-2019 (Sigest, 2019).


FIGAROVOX – Le magazine The Economist consacre son dernier numéro et sa couverture à une interview d’Emmanuel Macron dans laquelle il affirme que le monde est au bord du précipice. La situation internationale est-elle aussi apocalyptique que celle que décrit le chef de l’État?

Caroline GALACTEROS – Il me semblait que le Président, dans son interview, avait appliqué cet oracle à l’Europe et non du monde. Le monde n’est pas du tout au bord du précipice. Il se rééquilibre autour de puissances qui assument leur souveraineté, définissent leurs ambitions et se donnent les moyens de les mettre en œuvre. Ce sont nos utopies qui sont en déroute et c’est bien l’Europe qui tombe dans l’insignifiance stratégique (une forme de mort cérébrale) subitement privée de la béquille mentale que lui fournissaient le lien transatlantique et son alignement servile sur les injonctions américaines. Quant à la France, elle danse sur un volcan et pas seulement au plan extérieur. Si la présente lucidité présidentielle se consolide par des actes et des dynamiques durables, alors nous éviterons le pire et peut-être même renverserons-nous enfin la vapeur à notre avantage. Ce serait là, sur le plan stratégique, une vraie et salutaire «disruption». Après Biarritz, Moscou, la Conférence des Ambassadeurs et désormais cette interview, la grande question est désormais la suivante: Jusqu’à quel point sommes-nous déterminés à désobéir et à assumer les critiques ou la résistance active de certains de nos partenaires européens?


Notre vieux continent est en pleine dépression post-traumatique non traitée.


Le rôle de pionnier, de défricheur d’une voie nouvelle est périlleux et demandera beaucoup de ténacité. Jusqu’au moment où certains de nos partenaires, entrevoyant la liberté, voleront au secours de la victoire et nous emboîteront le pas, notamment en Europe du Sud mais pas seulement. Notre vieux continent est en pleine dépression post-traumatique non traitée. Le choc? Notre abandon sans états d’âme par la figure paternelle américaine. Sur le fond, rien de bien nouveau mais le verbe trumpien nous a brutalement ouvert les yeux sur le profond mépris et l’indifférence en lesquels Washington nous tient. La servilité ne paie jamais vraiment. Emmanuel Macron a bien raison de douter de l’applicabilité de l’article 5 du Traité de l’Alliance atlantique. Le problème n’est pas de savoir si les États-Unis voleraient au secours d’un État européen attaqué par la Russie ou Chine. La Russie a vraiment d’autres chats à fouetter et la Chine «attaque» déjà l’Europe tous azimuts économiquement. Non, le problème est bien celui d’un fatal entraînement de la France ou d’un autre membre de l’Otan si jamais la Turquie venait à être prise à partie militairement par la Syrie en réponse à sa violation caractérisée de la souveraineté syrienne. Scénario peu probable à vrai dire, car Moscou ne laissera sans doute pas un tel engrenage ruiner ses patients efforts pour en finir avec la déstabilisation de son allié moyen oriental. Même chose si l’Iran venait à réagir à une provocation savante téléguidée par Washington. Moscou, Téhéran et Ankara ont partie liée pour régler le sort de la Syrie au mieux de leurs intérêts respectifs et Washington comme Damas n’y peuvent plus rien. Ce qui est certain, néanmoins, c’est que la Turquie n’agit à sa guise en Syrie qu’avec l’aval américain. Washington laisse faire ce membre du flanc sud de l’Alliance qui lui sert en Syrie de nouvel agent de sa politique pro-islamiste qui vise à empêcher Moscou de faire totalement la pluie et le beau temps dans le pays et la région. Ankara gêne aussi l’Iran. Bref, ce que fait Erdogan est tout bénéfice pour Washington. Et les Kurdes ne font pas le poids dans ce «Grand jeu»? En conséquence, c’est bien l’Amérique qui dirige toujours et complètement l’Otan. S’il est bien tard pour s’en indigner ou faire mine de le découvrir, il n’est pas trop tard pour se saisir de cette évidence et initier enfin une salutaire prise de distance de l’Europe par rapport à une Alliance qui ne traite nullement ses besoins de sécurité propres.


Il faut que nous ayons aujourd’hui le courage d’en sortir et de dire que l’OTAN ne correspond pas à la défense des intérêts sécuritaires de l’Europe.


Nous restons extrêmement naïfs. Nous n’avons jamais eu voix au chapitre au sein de l’Alliance pas plus d’ailleurs depuis que nous avons rejoint le commandement intégré pour nous faire pardonner notre ultime geste d’autonomie mentale de 2003, lorsque nous eûmes l’audace de ne pas rejoindre la triste curée irakienne. Il faut que nous ayons aujourd’hui le courage d’en sortir et de dire que l’OTAN ne correspond pas à la défense des intérêts sécuritaires de l’Europe et d’ailleurs que l’épouvantail de la prétendue menace russe est une construction artificielle destinée à paralyser le discernement des Européens, à les conserver sous tutelle, à justifier des budgets, des postures, des soutiens résiduels au lieu de construire enfin une véritable stratégie propre à l’Europe en tant qu’acteur et cible spécifique stratégique. Je rejoins là notre président. Mais je ne crois pas du tout que L’OTAN soit en état de mort cérébrale. Il devient juste clair que ce qui pouvait, aux yeux de bien des atlantistes, justifier notre alignement silencieux et quasi inconditionnel a vécu. Trump veut faire payer les Européens pour qu’ils achètent des armes…américaines et obéissent aux décisions d’intervention américaines qui ne les concernent pas. Il est temps de ne plus supporter ce chantage et de sortir de l’enfance stratégique. Nous en avons les moyens. Il ne manquait que la volonté.

De son côté l’UE peine à définir une politique étrangère commune, croyez-vous la diplomatie européenne encore?

Je n’y ai jamais cru! Je ne vous rappellerai pas le cruel sarcasme de Kissinger «L’Europe? Quel numéro de téléphone?» Ce qui est possible, c’est de faire sauter un tabou ancien qui veut que l’affirmation de la souveraineté des nations européennes soit antinomique de la puissance collective et un autre, qui veut que l’élargissement de l’UE ait été destiné à la rendre puissante et influente. C’est précisément tout l’inverse. Mais il est trop tard pour regretter cet élargissement brouillon et non conditionnel stratégiquement. Il faut partir du réel et le réel, c’est qu’il existe une très grande divergence entre les intérêts stratégiques américains et ceux des Européens qui doivent se désinhiber. La France peut prendre la tête de cette libération et favoriser une conscience collective lucide et pragmatique des enjeux communs sécuritaires et stratégiques.

Il faut commencer par une véritable coopération industrielle à quelques-uns en matière de défense, sans attendre une unanimité introuvable. Il faut créer des synergies, faire certaines concessions et en exiger d’autres, et ne plus tolérer la moindre critique de Washington sur les contributions à une Alliance enlisée dans d’interminables et inefficaces opérations.

Alors qu’Emmanuel Macron rentre d’un voyage officiel en Chine, vous écrivez, «La Chine a émergé tel un iceberg gigantesque». La Chine est en train de tisser son empire autour du globe, est-elle en train d’imposer son propre contre modèle à l’Occident?

Pékin agit très exactement comme Washington et joue l’Europe en ordre dispersé. Oui le «contre monde» comme je l’appelle est en marche. La Chine profite du tirage entre Washington et les Européens au fur et à mesure que les pays européens prennent conscience qu’ils ne comptent plus pour l’Amérique, mis à part pour justifier un dispositif otanien contre Moscou et empêcher le rapprochement stratégique avec la Russie qui seule pourrait donner à l’Europe une nouvelle valeur ajoutée dans le duo-pôle et triumvirat Washington -Moscou-Pékin. C’est Sacha Guitry je crois qui disait que les chaînes du mariage sont si lourdes qu’il faut être trois pour les porter. L’adage est valable pour l’Europe à mais aussi pour Moscou qui sait combien «le baiser de la mort» chinois peut, à terme, lui être fatal. L’Europe n’a donc pas encore tout à fait perdu de son intérêt aux yeux de Moscou même si, en ce qui concerne la France, la charge affective et historique du lien a été très abîmée. Il me semble donc que l’initiative française d’une relance d’un «agenda de confiance et de sécurité» est un pas important dans cette direction qu’il faut jalonner à bon rythme de réalisations concrètes.

La guerre commerciale semble être la forme conflictuelle privilégiée par l’administration de Donald Trump. Les sanctions américaines pleuvent sur les entreprises chinoises, en Iran, en Russie. La guerre commerciale devient-elle un des éléments structurant d’un monde Yalta 2.0?

La fin de l’utopie d’une mondialisation heureuse a permis la résurgence d’une politique de puissance et d’influence décomplexée. Or le commerce est l’instrument privilégié de ces relations. Il n’y a qu’en France que l’on croit encore aux pures amitiés et aux affections qui guideraient les rapprochements entre États. Attention! Je ne veux pas dire que les relations personnelles, l’empathie ou l’animosité ne comptent pas, bien au contraire. Mais ce qui compte dans l’établissement du rapport de force et dans la consolidation des rapprochements, ce sont les complémentarités économiques mais aussi culturelles et même civilisationnelles et surtout la fiabilité de la parole donnée et la crédibilité interne des dirigeants.

Votre livre donne un aperçu global de l’état des relations diplomatiques depuis les cinq dernières années. Le monde depuis 1989, puis 2001 est en constante restructuration. Le jeu des puissances est mouvant. Quelle place la France peut-elle occuper dans un monde géopolitique si instable et imprévisible? Comment peut-on participer à construire une «coexistence optimale»?

La France doit se voir en grand car elle a de sérieux atouts de puissance et d’influence mais elle n’en use pas à bon escient. Elle se complaît dans la repentance et l’alignement. Notre place dépendra en premier lieu de notre capacité à structurer une vision et un chemin puis dans notre ténacité à défendre nos intérêts et à affirmer nos principes.


Un État puissant est un État sûr, qui sait d’où il vient, n’a pas honte de son passé et embrasse l’avenir avec confiance.


Il nous faut effectuer un tournant pragmatique en politique étrangère et en finir avec l’idéologie néoconservatrice. Celle-ci a dramatiquement vérolé toute une partie de notre administration et de nos élites qui ne savent plus ce qu’est l’intérêt national. La France est toujours une puissance globale. Plus que nombre d’autres. Simplement, elle doit retrouver une économie florissante, restructurer son industrie, remettre son peuple au travail autour d’un projet de prospérité lié à l’effort et non à l’incantation. Un État puissant est un État sûr, qui sait d’où il vient, n’a pas honte de son passé et embrasse l’avenir avec confiance.

La Russie de Vladimir Poutine s’est imposée aux puissances occidentales comme un acteur majeur des relations géopolitiques. Son attitude sur la crise syrienne incarne ce positionnement dans l’échiquier mondial. La Russie peut-elle être un allié «fréquentable» des puissances européennes? La distance entre les Européens et les Russes en termes de politique internationale est-elle encore légitime?

La Russie est tout à fait fréquentable. La diabolisation infantile à force d’être outrancière, dont elle fait l’objet chez nous, nous ridiculise et surtout la conforte dans une attitude de plus en plus circonspecte envers ces Européens qui ne savent plus penser ni décider par eux-mêmes.


L’UE doit se projeter vers l’Union Économique Eurasiatique (UEE) et nouer avec elle de très solides partenariats.


En 30 ans, la Russie a vécu le pire durant les années 90 puis a entamé sans violence une remarquable reconstruction nationale. Tout n’y est pas parfait, mais pouvons-nous réellement donner des leçons et nous imaginer être encore pris au sérieux après les sommets de cynisme démontrés dans nos propres ingérences étrangères, avec les résultats que l’on sait? C’est là une posture qui sert essentiellement à se défausser, à ne pas aller de l’avant notamment sur les dossiers où nous pourrions et aurions tout intérêt à tendre la main à la Russie: sanctions, Ukraine Syrie, Libye, Union économique eurasiatique (UEE), etc… Sur ce dernier point, il faut nous montrer un peu plus lucides et anticipateurs que sur les Nouvelles Routes de la Soie sur lesquelles nos diplomates ironisaient il y a encore quelques années. L’UE doit se projeter vers l’Union Économique Eurasiatique (UEE) et nouer avec elle de très solides partenariats. Je souhaite de tout cœur que la récente inflexion imprimée par notre président à la relation franco-russe après une sombre et triste période, passe rapidement dans les faits et que nous soyons le maillon fort d’une nouvelle ère collaborative, intelligente et humaine entre la Russie l’Europe.

La solution diplomatique peut-elle encore jouer un rôle dans le dossier syrien?

Une solution diplomatique ne peut exister que si l’on a atteint un équilibre militaire acceptable. La Syrie doit d’abord recouvrer son intégrité territoriale. Après les Syriens décideront de ce qu’ils souhaitent politiquement pour leur pays.


Nous avons eu tout faux sur le dossier syrien.


Notre implication a été si humainement et politiquement désastreuse qu’il est impossible de prétendre encore pouvoir décider du sort de ce pays à la place de son peuple. Évidemment, la guerre n’est pas finie. Il y a encore des dizaines de milliers de djihadistes fondus dans la population civile d’Idlib. Il y a la Turquie, la Russie et l’Iran qui consolident dans un vaste marchandage leurs influences respectives. Et il y a tous les autres acteurs régionaux et globaux qui cherchent à tirer leur épingle du jeu et à faire oublier leurs méfaits. Nous avons eu tout faux sur le dossier syrien. Je l’ai assez expliqué, démontré et je n’épiloguerai pas. J’en parle abondamment dans mon recueil. Il est trop tard pour pleurer mais sans doute pas pour faire amende honorable, intégrer le processus d’Astana et son actuel dérivé – le Comité constitutionnel en cours de formation à Genève. Cela aussi, nous le devons à l’approche diplomatique inclusive et non idéologique de Moscou, ne nous en déplaise. Essayons, pour une fois, d’être intelligents et d’avancer pour que le peuple syrien sorte au plus tôt de son interminable martyr.

Source de l’article

Les grandes manœuvres internationales en Syrie

Les grandes manœuvres internationales en Syrie Major international manoeuvres in Syria

Le président turc Recep Tayyip Erdogan rencontrera le président russe Vladimir Poutine à Moscou le 23 janvier pour tenter de rétablir la politique turque de la Turquie.

Poutine veut que le gouvernement syrien prenne le contrôle de l’est de la Syrie, et finalement du pays tout entier, après le retrait des troupes américaines.

La priorité d’Erdogan est que les Unités de protection du peuple, qui forment le noyau des Forces démocratiques syriennes (SDF) soutenues par les États-Unis, ne concluent pas un accord avec Damas qui donne un second souffle à la force kurde syrienne après le départ des forces américaines …

À Damas, les relations avec le monde arabe sont une nouvelle mauvaise nouvelle pour la Turquie, qui a déjà du mal à faire face au changement rapide des rapports de force en Syrie », écrit Semih Idiz.

« Si le président Bashar al-Assad est de retour parmi les Arabes, comme beaucoup l’espèrent, ce sera le dernier clou de la politique d’Ankara en Syrie, qui a été minée par des erreurs de jugement, des suppositions erronées et des attentes trop ambitieuses ».

«Alors que des pays comme le Soudan, les Émirats arabes unis, Bahreïn, l’Égypte, la Jordanie, l’Iraq, le Liban et la Tunisie se rallient pour la normalisation des relations avec la Syrie – et beaucoup s’attendent à ce que l’Arabie saoudite finisse par les rejoindre – Ankara pourrait se retrouver face à un parti arabe anti-turc. un bloc auquel on ne s’attendait pas », ajoute Idiz.

« Un tel bloc pourrait également compliquer les projets de la Turquie d’entrer dans le nord de la Syrie pour débarrasser la ville de Manbij et les territoires situés à l’est de l’Euphrate des Unités de protection du peuple kurde… surtout maintenant que Damas a déclaré son opposition à cette incursion. » .. Erdogan fait face à des choix difficiles à venir à Idlib et Manbij. Idlib pourrait être « un atout de poids pour Ankara dans le cadre d’un éventuel accord avec la Russie », écrit Kirill Semenov.

«Moscou et le régime syrien ont voulu lancer une opération militaire contre HTS [Hayat Tahrir Al Sham (lié à al-Qaïda)] sans que les modérés ne s’opposent. Les groupes modérés ont maintenant disparu. »..

Le cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, émir du Qatar, a braqué les projecteurs à Beyrouth le 20 janvier, capitalisant sur les querelles arabes sur la Syrie pour remporter le premier siège du sommet économique arabe. Jusqu’à huit chefs d’Etat auraient dû participer au sommet, mais les tensions libanaises et régionales sur le rôle de l’Iran au Liban et le retour éventuel de la Syrie dans la Ligue arabe n’ont amené que les présidents somalien et mauritanien à déclarer qu’ils feraient le voyage en Iran. Beyrouth, avec d’autres participants présents au niveau ministériel. Ensuite, Cheikh Tamim a annoncé qu’il dirigerait la délégation de son pays. D’un coup, le Qatar est de retour dans le jeu, en Syrie et au Liban, aux dépens de l’Arabie saoudite, alors que Riyad continue de se sentir mal après l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi , écrit Bruce Riedel cette semaine

Turkish President Recep Tayyip Erdogan will meet Russian President Vladimir Putin in Moscow on Jan. 23 to try to reset Turkey’s flailing Syria policy.

Putin wants the Syrian government to take control of eastern Syria, and eventually the entire country, following the withdrawal of US troops.

Erdogan’s priority is that the People’s Protection Units, the core of the US-backed Syrian Democratic Forces (SDF), do not cut a deal with Damascus that gives the Syrian Kurdish force a second wind after US forces leave…

“The apparent thaw in Damascus’ relations with the Arab world is more bad news for Turkey, which is already having a difficult time coping with the rapid change in the balance of power in Syria,” writes Semih Idiz.

“If President Bashar al-Assad is welcomed back to the Arab fold, as many expect, it will be the final nail in the coffin of Ankara’s Syria policy, which has been plagued with misjudgments, false assumptions and overambitious expectations from the start.”

“As countries like Sudan, UAE, Bahrain, Egypt, Jordan, Iraq, Lebanon and Tunisia line up to favor the normalization of ties with Syria — and many expect Saudi Arabia to join them eventually — Ankara could end up facing an anti-Turkish Arab bloc it never expected,” adds Idiz.

“Such a bloc could also complicate Turkey’s plans to enter northern Syria to clear the town of Manbij and territories east of the Euphrates River from the Kurdish People’s Protection Units … especially now that Damascus has declared its opposition to this incursion.”.. Erdogan also faces difficult upcoming choices in Idlib and Manbij. Idlib could be a “bargaining chip for Ankara in a potential deal with Russia,” writes Kirill Semenov.

“Moscow and the Syrian regime have wanted to launch a military operation against HTS [al-Qaeda-linked Hayat Tahrir Al Sham] without the moderates in the way. The moderate groups are gone now.”..

Sheikh Tamim bin Hamad Al Thani, the emir of Qatar, seized the spotlight in Beirut on Jan. 20, capitalizing on Arab squabbling over Syria to take the first seat at the Arab economic summit. The summit was supposed to have included up to eight heads of state, but Lebanese and regional tensions over Iran’s role in Lebanon, and Syria’s possible return to the Arab League, led to only the presidents of Somalia and Mauritania saying they would make the trip to Beirut, with other participants attending at the ministerial level. Then Sheikh Tamim announced he would lead his country’s delegation, and in one stroke, Qatar was back in the game, on Syria and in Lebanon, at the expense of Saudi Arabia, as Riyadh continues to find its footing after the murder of journalist Jamal Khashoggi, as Bruce Riedel writes this week

Quelle est la situation des droits de l’homme aujourd’hui dans le monde ?

L’AFS vous recommande la lecture de cet article du Monde paru  le 4 août 2018.

Le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Zeid Ra’ad Al-Hussein, achève son mandat le 1er  septembre. Le diplomate jordanien de 54 ans dénonce dans un entretien au  Monde » l’ascension continue de l’autoritarisme, la continuation des rhétoriques populistes, les mensonges, les demi-vérités et les tromperies « .

Quelle est la situation des droits de l’homme aujourd’hui dans le monde ?

La pression sur les droits universels est une évidence. Les mécanismes et les lois sur les droits de l’homme doivent être défendus et promus en permanence. Tandis qu’on voit des progrès dans certains pays, comme récemment l’ouverture très encourageante aux droits civils et politiques en Ethiopie, on voit les terribles crimes perpétrés par des groupes extrémistes violents, on voit l’ascension continue de l’autoritarisme, la continuation des rhétoriques populistes, les mensonges, les demi-vérités et les tromperies. On voit la mise en cause de la nature universelle des droits de l’homme. Alors c’est une lutte. L’avancée pour le progrès humain a toujours été une lutte. Et j’ai le sentiment que l’accumulation des crises a atteint un point qui en fait un problème charnière.

Les atteintes aux droits de l’homme concernent donc à la fois des pays totalitaires et des pays démocratiques ?

Aucun pays n’est totalement exempt de violations des droits de l’homme. Aucun n’est totalement exempt d’un déficit concernant l’un des trois critères fondamentaux nous permettant de mesurer le comportement d’un pays : des gens sont-ils discriminés, des gens sont-ils malmenés, des gens vivent-ils dans la peur ? Je ne pense pas que quiconque puisse prétendre qu’il y ait de gouvernement parfait.

L’universalité des droits de l’homme est sans cesse remise en cause. Pourquoi les valeurs que vous défendez seraient-elles universelles ?

Si vous acceptez l’idée qu’il existe suffisamment de points communs entre êtres humains qui nous identifient comme étant une espèce, alors l’idée que nous naissons libres, que nous naissons avec le même droit d’accès aux droits humains, est une évidence.

Mon expérience est que, quand on parle aux victimes de violations des droits de l’homme, ils savent tous que les droits de l’homme sont universels. Il n’y a que ceux qui violent les droits de l’homme qui trouvent des excuses dans les traditions, les cultures, les circonstances. J’ai entendu les témoignages de victimes de beaucoup de pays, sur tous les continents, et ça ne varie pas : si vous avez souffert une perte, si un membre de votre famille a été détenu arbitrairement, s’il a disparu, s’il a été torturé, si quelqu’un a été privé de sa vie ou de sa liberté, la souffrance est identique.

La montée des populismes et des atteintes aux droits de l’homme dans des pays démocratiques, que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe, est-il un phénomène nouveau ?

Non. L’idée d’imposer aux autres un programme basé sur sa seule nationalité, en ne respectant aucune règle, l’idée que chacun devrait être  » le premier « , que ce soit  » America first  » ou  » n’importe qui first « , est une vieille idée qui a déjà donné des résultats catastrophiques. L’idée de créer un sentiment de peur au sein de peuples déjà anxieux des changements autour d’eux, l’idée d’évoquer une menace qui viendrait d’au-delà des frontières ou de minorités, sont de vieilles tactiques. Et ce n’est pas du génie : on sait que ça fonctionne à court terme, que ça peut faire gagner une élection.

Mais les conséquences à long terme sont catastrophiques. Une fois qu’un nationalisme s’est réellement implanté, le seul moyen d’en venir à bout est à travers le conflit. Vous ne pouvez pas créer un sens d’exceptionnalisme ou de supériorité au sein d’une société et dire un beau jour :  » Au fait, nous nous sommes trompés, nous sommes tous égaux et avons les mêmes droits. «  C’est pourquoi cette politique est extrêmement risquée. Le fait de voir l’autoritarisme revenir dans des parties du monde que l’on pensait acquises aux règles démocratiques, aux droits civiques et au respect des droits de l’homme, est profondément dérangeant.

D’où vient ce mouvement ?

Je pense que le réveil des nationalismes est dû au fait que, dans des cycles politiques à court terme et dans un contexte de multiples changements planétaires, la rhétorique nationaliste fonctionne. On blâme les migrants. Or, la réalité est que 4,5  % de la population mondiale est actuellement en mouvement. Cela signifie que 95,5  % des gens restent là où ils sont ! Toute cette psychose et cette pression, par exemple sur l’Union européenne, est le résultat de ces 4,5  % de gens en mouvement, quand bien même certains ne sont pas des Africains en route pour l’Europe : beaucoup de mouvements – de migrants – vont du Sud vers le Sud. Politiquement ça marche, mais sans aucune vision des conséquences.

D’un autre côté, le Bangladesh accueille soudainement 600 000 personnes – des Rohingya venus de Birmanie – . Le Bangladesh, qui n’est même pas signataire de la convention de 1951 sur les réfugiés, aurait pu miner sa frontière en prétextant une menace sécuritaire.

La source du problème est la xénophobie. Pour un xénophobe, peu importe que trois cents étrangers vivent à ses côtés ou un seul. Un seul suffit. Alors comment en finir avec la xénophobie ? Comment en finir avec la discrimination ?

En ex-Yougoslavie, là où j’ai commencé ma carrière, on sait ce qu’il est advenu lorsque ces idées ont été transformées en armes. On a vu les actes les plus cruels. Que voulaient-ils : des pays ethniquement purs ? Un retour au passé ? L’histoire de l’humanité a été sanglante et cruelle, et ils voulaient revenir à une époque d’arbitraire et d’injustice. L’idée que ce soit possible est insupportable.

Après le sentiment de progression des droits humains dans les années 1990, le tournant a-t-il été le 11-Septembre et la réponse qu’y a apporté l’administration Bush ?

Oui, certainement. La création de ce Haut-Commissariat pour les droits de l’homme en  1993, la création des tribunaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, puis l’établissement de la Cour pénale internationale, furent des étapes d’une importance considérable. Il y avait un sentiment du possible. Il suffit de regarder le nombre de traités et de conventions : beaucoup de travail a été effectué dans les années 1990.

Puis, avec le 11-Septembre et la guerre d’Irak, tout s’est progressivement compliqué. La crise irakienne fut un tournant, avec notamment le fait que la torture gagne de nouveau une sorte d’admissibilité.

Cette régression est-elle un succès pour Al-Qaida, deux décennies après sa déclaration de guerre ?

Il faut accepter le fait que des groupes extrémistes et violents peuvent perturber des sociétés avec leurs terrifiantes attaques, mais il est peu probable qu’ils puissent détruire la planète. Seuls les gouvernements peuvent détruire la planète. Dans le combat contre ces extrémistes, il faut appliquer strictement et intelligemment la loi. Il faut être respectueux des droits humains de chacun. Sinon l’Etat, au fil du temps, commence à ressembler au groupe qu’il combat.

Votre façon de dénoncer haut et fort toutes les atteintes aux droits de l’homme et le fait que vous vous soyez mis à dos -quasiment tous les Etats de la planète semblent faire débat au sein de l’ONU, notamment sur l’efficacité de la démarche. Qu’en pensez-vous ?

Je crois que l’ONU doit parler haut et fort. Revenons aux accusations centrales envers les Nations unies au moment du génocide des Tutsi du Rwanda : c’est que l’ONU n’a pas parlé au moment où elle aurait dû parler. Ce fut l’accusation principale contre l’ONU également en ex-Yougoslavie. La leçon de l’ex-Yougoslavie est aussi que si on s’autorise à être plus terrifié que les gens auxquels on parle, si l’ONU n’est pas respectée, si les règles ne sont pas respectées, alors c’est l’impunité, et le désastre arrive.

Ce que j’ai retenu de mon expérience en ex-Yougoslavie est que je préfère commettre une erreur en parlant haut et fort plutôt que de ne rien dire et de le regretter terriblement ensuite. Je le dis à mes collègues de l’ONU : personne ne se souviendra de vous pour votre silence.

Les défenseurs des droits de l’homme défendent les droits de chaque individu. Les autres défendent les droits d’une communauté particulière. C’est la différence. Défendre les droits d’une communauté contre d’autres communautés, c’est créer les conflits de demain. Les violations des droits de l’homme d’aujourd’hui sont les conflits de demain. Quelle humanité veut-on ? Une humanité où lorsqu’on est menacé par la guerre, la mort, personne ne vous accueille ? C’est ce que ces populistes tentent de -promouvoir. C’est de l’égoïsme. Et ce sera terrible si nous ne résistons pas.

Propos recueillis par Rémy Ourdan

© Le Monde

 

 

La Charte des Nations unies a une nouvelle fois été bafouée.

La Charte des Nations unies a une nouvelle fois été bafouée.

Sans aucune décision du Conseil de sécurité, donc sans mandat de l’ONU, les États-Unis en tête, la Grande-Bretagne et la France ont frappé la Syrie dans la nuit de vendredi à samedi, les 13 et 14 avril dernier en guise de représailles aux « présumées attaques chimiques sur Douma ».

Alors que l’OIAC devait lancer ses investigations en vue de vérifier la présence de gaz toxique le 14 avril, manifestemen,t sans aucune preuve de l’origine de ces attaques chimiques, la France a embrayé le pas pour participer aux frappes punitives contre la Syrie, État indépendant, membre des Nations Unies.

L’AFS, qui se bat depuis le début du conflit syrien pour préserver l’amitié séculaire entre la France et la Syrie, entre les Français et les Syriens et pour instiller un esprit de médiation dans cette horrible guerre voit ses ambitions ruinées par de tels  actes.

Alors que la France pourrait se démarquer de la logique guerrière des États-Unis, pour jouer un rôle capital en faveur du peuple syrien, en ouvrant une antenne consulaire dédiée à nos compatriotes doubles nationaux ou pas et en prenant l’initiative de faire lever l’embargo sur les produits de 1re nécessité, afin de montrer que la France est aux côtés du peuple syrien qui souffre tellement après plus de 7 ans de guerre, les armes ont pris le dessus.

L’AFS ne peut que condamner une telle violation du droit international et souhaite ardemment un retour fort et immédiat aux principes qui ont été institués par la Charte des Nations Unies.

Elle appelle au retour de la France vers une politique humanitaire en Syrie en faveur du peuple syrien qui se comporte d’une manière admirable dans ce drame qui n’en finit pas.

La politique sans conscience n’est que ruine de l’âme.

Macron et le roi de Jordanie en accord sur la Syrie et le terrorisme

AFS: Est-ce le début d’un infléchissement de la politique de la France en Syrie?

 » Nous souhaitons construire une solution diplomatique inclusive dans la région qui permette cette stabilité ». a déclaré le Président Emmanuel Macron.
Le président Emmanuel Macron et le roi de Jordanie Abdallah II (g), lors d’une rencontre à l’Elysée, le 19 juin 2017 à Paris (afp)

Emmanuel Macron et le roi de Jordanie Abdallah II ont souligné lundi leur « vision commune sur les défis du Moyen-Orient », avec comme « premier sujet la lutte contre le terrorisme et la radicalisation » ainsi que la crise en Syrie.

« Je veux exprimer au roi mon admiration sur sa façon de préserver la Jordanie qui reste un pôle de stabilité dans la région, alors que des fractures nombreuses aurait pu toucher votre pays », a déclaré le président français devant la presse, à l’issue d’un entretien à l’Elysée.
« La Jordanie est un membre important de la coalition internationale contre Daech et accueille une partie de notre dispositif militaire », a-t-il rappelé. « L »engagement de la France au côté de la Jordanie restera entier dans la lutte contre le fléau terroriste ».
Quant à la crise syrienne, « nous partageons le même sentiment d’urgence de construire les moyens d’une stabilisation militaire dans le sud de la Syrie et nous souhaitons construire une solution diplomatique inclusive dans la région qui permette cette stabilité ».
« La France est fortement impliquée dans cette action diplomatique, à travers le dialogue avec plusieurs puissance de la région » ainsi que la Russie et la Turquie, a-t-il dit.
Les deux chefs d’Etat ont aussi évoqué le dossier israélo-palestinien. « Je réitère ma condamnation de l’attaque vendredi à Jérusalem mais aussi la poursuite de la colonisation qui menace une solution à deux Etats », a dit M. Macron.
Il a enfin rendu hommage au journaliste irakien tué et aux trois journalistes français blessés à Mossoul, exprimant « la solidarité de la France et du chef de l’Etat à l’égard de ces hommes et ces femmes qui font leur travail et auprès desquels nous serons constamment ».
De son côté, le roi de Jordanie a dit vouloir « continuer le partenariat stratégique » avec la France. « Les défis économiques, sécuritaires ou le terrorisme doivent nous conduire à agir ensemble dans la région ». Faute de solution, « le terrorisme va continuer à se répandre », a-t-il averti.
« C’est également dans l’intérêt de l’Europe, c’est pour cela que nous avons accordé autant d’importance à nos relations avec les pays européens et la France », a-t-il poursuivi. Le dirigeant jordanien a aussi souligné les conséquences humanitaires et économiques du flux de réfugiés syriens en Jordanie, et espéré que les investissements français en Jordanie — premier pays investisseur non-arabe dans la pays — allaient se poursuivre.

L’Est syrien, enjeu véritable des négociations d’Astana pour la paix en Syrie

Nous vous proposons un article rédigé par Caroline Galactéros,  Administrateur de l’AFS, qu’elle a publié sur son blog: Bouger les lignes sur lequel vous pourrez lire ses nombreux articles.

Il apporte un éclairage remarquable sur la complexité de la situation en Syrie au plus grand préjudice du peuple syrien.

Il permet de replacer les responsabilités de chacun à leur juste niveau.

Nous la remercions pour la qualité de son travail. (AFS)

11 Mai 2017.

Signature du mémorandum établissant les zones de désescalade lors du quatrième cycle des négociations pour la paix en Syrie, à Astana, Kazakhstan, le 4 mai 2017. Aliia Raimbekova/Anadolu Agency/Getty Images.

Signature du mémorandum établissant les zones de désescalade lors du quatrième cycle des négociations pour la paix en Syrie, à Astana, Kazakhstan, le 4 mai 2017. Aliia Raimbekova/Anadolu Agency/Getty Images.

Les 3 et 4 mai 2017 se sont tenues les quatrièmes rencontres internationales d’Astana sur la Syrieentre les délégations syrienne, russe, iranienne, turque et celle de « l’opposition armée », cette dernière étant représentée par le groupe salafiste Jaysh al-Islam. Etaient également présents l’envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie, Staffan da Mistura, et pour la première fois les États-Unis, en la personne de Stuart Jones, Secrétaire d’Etat pour les affaires proche-orientales. Dans le même temps, Vladimir Poutine recevait Recep Tayyip Erdogan à sa résidence estivale de Botcharov Routcheï à Sotchi.

Mise en place de zones de désescalade

Un memorandum mettant en place quatre « zones de désescalade » fut signé par les trois pays garants des parties en conflit : la Russie et l’Iran pour la Syrie, la Turquie pour les « rebelles ». Ce mémorandum instaure un cessez-le-feu, poursuit l’évacuation des enclaves rebelles assiégées (notamment ceux de Damas), et permet retour des réfugiés volontaires dans leur région d’origine. Il fut toutefois dénoncé par l’opposition elle-même, pourtant partie aux négociations, notamment en raison de la présence de l’Iran. Selon Le Monde, Yasser abd ar-Rahim, membre de la délégation rebelle, aurait interrompu la séance en invectivant violemment la délégation iranienne : « Les Iraniens tentent de se présenter et d’agir en tant que garants. C’est quelque chose que nous ne pouvons accepter. Depuis le premier jour, ils tuent des civils sur le terrain », avant de « spectaculairement claquer la porte des négociations devant les caméras. »

Outre le fait que Yasser abd ar-Rahim a été en fait invité à évacuer la salle plus qu’il n’en a « claqué la porte », Le Monde oublie de rapporter que ce personnage est surtout connu pour être l’ancien commandant du groupe islamiste Fatah Halab (« Conquête d’Alep »), actif à Alep lors de l’offensive gouvernementale en 2016, et qui fit, en août de la même année : « le serment que la coalition des groupes armés se “vengerait” des Kurdes à Cheik Maqsoud [quartier d’Alep tenu par les Kurdes], précisant que ces derniers ne “trouveraient plus de place où enterrer leurs morts à Alep” », comme le rapporte les Nations Unies dans le Rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne de février 2017 (pp. 17-18). Déclarations hélas suivies d’effets envers les populations civiles, exactions considérées comme des crimes de guerre par l’ONU. La persistance occidentale à vouloir voir des rebelles modérés là où se déchainent des combattants islamistes ou salafistes ultra-radicaux, notamment au seine de la « veine » de Jaysh al-Islam, est une cécité volontaire très lourde de conséquences humaines.

Ce texte prévoit donc d’établir quatre zones de désescalade. Il s’agit des quatre enclaves rebelles dans l’ouest du pays : région d’Idlib au Nord de la Syrie, poche de Homs-nord, poche de Damas-est (ou Ghouta orientale), et enfin zone au sud de la Syrie, le long de la frontière syro-jordanienne et du Golan syrien occupé par Israël.

En gris clair : les zones de désescalade du mémorandum contrôlées par les rebelles ; en violet : la zone contrôlée par les rebelles pro-turcs ; en bleu : les zones rebelles non concernées par le mémorandum d’Astana ; en noir : les zones contrôlées par l’Etat islamique ; en vert : les zones contrôlées par les FDS ; en rouge : les zones contrôlées par les forces gouvernementales ; en marron le Golan israélien occupé par Israël et les forces de l’ONU. Al-Masdar News, modifiée.

En gris clair : les zones de désescalade du mémorandum contrôlées par les rebelles ; en violet : la zone contrôlée par les rebelles pro-turcs ; en bleu : les zones rebelles non concernées par le mémorandum d’Astana ; en noir : les zones contrôlées par l’Etat islamique ; en vert : les zones contrôlées par les FDS ; en rouge : les zones contrôlées par les forces gouvernementales ; en marron le Golan israélien occupé par Israël et les forces de l’ONU. Al-Masdar News, modifiée.

A noter que les zones tenues par les rebelles le long de la frontière syro-jordanienne et syro-irakienne (en bleu sur la carte), soutenus par les Etats-Unis, et récemment actifs dans ce secteur (nous y reviendrons), ne sont pas comprises dans cet accord que les Etats-Unis ont salué tout en exprimant naturellement des réserves à l’égard de son « patronage» par l’Iran. Enfin, les forces aériennes de la coalition internationale ont interdiction de pénétrer dans l’espace aérien de ces zones.

Situation militaire en Syrie au 11 mai 2017

Pour saisir les enjeux de cet accord, il convient d’effectuer un rapide tour d’horizon de la situation militaire en Syrie à jour (12/05/2017).

Les contres-offensives gouvernementales de mars-avril-mai 2017

A la veille de la signature du memorandum, les forces gouvernementales et pro-gouvernementales poursuivaient avec succès leur contre-offensive au nord de Hama, répondant à une offensive lancée le 21 mars dernier par le Hayat Tahrir al-Cham (HTS), alliance principalement constituée du Jabhat Fatah al-Cham (ex Jabhat al-Nosra, Al-Qaida en Syrie), Ahrar al-Cham, ainsi que de plusieurs autres groupes salafistes ou islamistes affiliés à l’Armée syrienne libre (ASL). C’est dans le cadre de cette contre-offensive que s’est inscrite l’attaque chimique de Khan Cheikhoun, le 4 avril dernier.

Situation militaire au nord de Hama le 23/03 et 02/05/2017. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles (cliquez pour agrandir).Situation militaire au nord de Hama le 23/03 et 02/05/2017. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles (cliquez pour agrandir).

Situation militaire au nord de Hama le 23/03 et 02/05/2017. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles (cliquez pour agrandir).

Parallèlement, une autre offensive était lancée le même jour depuis la Ghouta orientale, principalement dans le quartier de Jobar et la zone industrielle de Qaboun, menée par le Faylaq al-Rahman, HTS et Ahrar al-Cham. Cette offensive fut toutefois rapidement circonscrite par les forces gouvernementales, avant que ces dernières ne gagnent du terrain sur les rebelles.

Les quartiers rebelles de Qaboun, Jobar et Zamalka à l'est de Damas au 22/03 et 05/05/2017 (cliquez pour agrandir).Les quartiers rebelles de Qaboun, Jobar et Zamalka à l'est de Damas au 22/03 et 05/05/2017 (cliquez pour agrandir).

Les quartiers rebelles de Qaboun, Jobar et Zamalka à l’est de Damas au 22/03 et 05/05/2017 (cliquez pour agrandir).

Depuis, l’alliance entre les groupes rebelles de la Ghouta orientale a volé en éclats et de violentes confrontations ont eu lieu entre le Faylaq al-Rahman et les salafistes du Jaysh al-Islam (ceux-là même qui représentent la « rebellion » à Astana), entraînant de nombreuses pertes des deux côtés.

Progression pour la reprise de Raqqa par les Forces démocratiques syriennes

Comme nous l’évoquions en mars dernier, la reprise de Raqqa par la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS) soutenues par les Etats-Unis s’est poursuivie par la reprise du « verrou stratégique » de Taqba à l’Etat Islamique (EI), mercredi 10 mai. Dans la nuit du 21 au 22 mars dernier – coïncidence ou calcul tactique victorieux permis par la « fixation » des forces syriennes pour répondre aux assauts rebelles à Hama et Damas -, des troupes des FDS et des forces spéciales américaines ont été héliportées 15 km à l’ouest de Taqba, depuis l’autre rive du Lac Assad. Celles-ci libérèrent plusieurs localités avant de reprendre l’aéroport au sud de Taqba et d’encercler la ville, tandis que les FDS sur l’autre rive de l’Euphrate encerclaient la ville par le nord.

Carte des opérations de la bataille de Taqba (2017) du 22/03 au 10/05/2017. En noir : l'EI ; en jaune : les FDS. Wikipedia.

Carte des opérations de la bataille de Taqba (2017) du 22/03 au 10/05/2017. En noir : l’EI ; en jaune : les FDS. Wikipedia.

C’est la première fois que la coalition arabo-kurde franchit l’Euphrate, signe que Washington compte désormais s’appuyer pleinement sur cette force. Le contrôle de Taqba est triplement stratégique pour les FDS et les Etats-Unis, car il permet de :

  • couper la route ouest de Raqqa, accentuant la pression sur l’EI pour la reprise de la ville.
     
  • tenir le barrage de Taqba, important pour le contrôle de l’eau dans le pays.
     
  • bloquer la route reliant Alep à Raqqa aux forces gouvernementales syriennes qui pouvaient progresser depuis Alep.

Reste à savoir si les FDS vont désormais couper la route reliant Ithriya à Raqqa, au sud de cette dernière, encerclant complètement la ville et empêchant toute participation de Damas à cette opération, ce qui aurait évidemment d’importantes incidences politiques quant aux partage des zones d’influence qui se dessine et au rapport de force plus global américano-russe.

Carte des mouvements bloqués des forces gouvernementales pour reprendre Raqqa après la capture de Taqba par les FDS. SouthFront, modifiée.

Carte des mouvements bloqués des forces gouvernementales pour reprendre Raqqa après la capture de Taqba par les FDS. SouthFront, modifiée.

Fin de l’opération turque en Syrie

Le 29 mars dernier, Binali Yildrim, Premier ministre turc, annonçait la fin de l’intervention turque en Syrie (opération « Bouclier de l’Euphrate »). Nous étions revenus sur le fait qu’après la reprise d’al-Bab à l’EI par l’ASL pro-turque, la Turquie se retrouvait bloquée par les forces gouvernementales syriennes au sud, mais aussi, à l’ouest (Afrin) et à l’est (Manbij), par les FDS sous double et concurrente protection russe et américaine.

Au grand dam de R.T. Erdogan, la Turquie et l’ASL furent également exclues de la reprise de Raqqa par les Etats-Unis qui préférèrent s’appuyer sur les FDS arabo-kurdes, insupportable avanie aux yeux du président turc, puisqu’elles sont majoritairement composées des YPG kurdes, branche armée du PYD, organisation terroriste selon Ankara. Cela explique probablement les récentes frappes turques sur le territoire tenu par les FDS depuis deux semaines, et le rassemblement de troupes le long de la frontière turco-syrienne, menaçant d’une nouvelle intervention turque en Syrie, cette fois-ci dirigée directement contre les Kurdes. Tout comme ce fut le cas pour Manbij, qu’Erdogan menaça d’attaquer après la reprise d’al-Bab, les Etats-Unis déployèrent des patrouilles le long de la frontière syro-turque tenue par les FDS pour dissuader les velléités turques, tandis que Russes et forces gouvernementales se déployaient ostensiblement du côté d’Afrin.

Il s’agit une nouvelle fois pour Erdogan de faire pression sur ses alliés pour s’imposer à la table des négociations politiques. En forçant les YPG à se redéployer au nord pour anticiper la menace turque, les opérations pour la reprise de Raqqa ralentissent. Peine perdue puisque les Américains ont affirmé leur soutien au YPG en se rendant sur le lieu des frappes. Plus significatif encore, Jeff Davis, porte parole du Département de la Défense, a annoncé ce 9 mai que les Etats-Unis vont armer les FDS, « seule force capable de prendre Raqqa dans un futur proche » (lire l’article de Georges Malbrunot dans Le Figaro du 11 mai 2017), conformément à leur demande depuis des années. Washington prend toutefois la précaution de rappeler que ce soutien sera limité à « des mitraillettes, des armes légères, des munitions et des véhicules blindés ». Décidément sans aucun scrupule, R.T. Erdogan déclara que le combat contre l’EI « ne devait pas être mené en aidant une autre organisation terroriste ».

Il faut remarquer que la Russie, qui soutient aussi  les YPG plus ou moins directement selon les circonstances, trouve son intérêt dans ces bombardements turcs. Comme nous l’avons dit, ceux-ci ralentissent les opérations kurdo-américaines dans l’est syrien, ce qui permettra, nous allons le voir, aux forces gouvernementales et pro-gouvernementales syriennes de progresser dans la course pour l’Est syrien. Mais l’effet pourrait surtout être politique. Ces bombardements poussent en effet les Kurdes à revenir dans le giron de Damas et à renoncer à leur désir d’une possible autonomie territoriale que la Turquie n’accepterait de toute façon jamais et qui pourrait raidir en conséquence la relation russo-turque importante aux yeux de Moscou à plus d’un titre. C’est la tactique que perçoit et dénonce Riza Altrun, membre du conseil exécutif du KCK, émanation politique kurde du PKK turc.

La course pour l’Est syrien, entre entente et concurrence russo-américaine

     Maintenant que le front occidental contre les rebelles se trouve stabilisé grâce au memorandum, Damas peut redéployer ses forces sur le front oriental contre l’EI et se consacrer à la reprise d’une autre partie du territoire national .

Une carte publiée le 5 mai sur le compte Twitter de Syrian Generation montre quels pourraient être les prochains mouvements du gouvernement syrien. Les faits ont depuis démontré la justesse de ces prédictions.

Mouvements potentiels des forces gouvernementales. En bleu : la première phase des opérations ; en rouge foncé : la deuxième ; en violet : la troisième potentielle. Syrian Generation.

Mouvements potentiels des forces gouvernementales. En bleu : la première phase des opérations ; en rouge foncé : la deuxième ; en violet : la troisième potentielle. Syrian Generation.

L’enjeu prioritaire pour Damas est tout d’abord de consolider son flanc oriental, notamment la mince bande sous leur contrôle reliant Hama à Alep, ainsi que la route reliant Homs à Palmyre, sur laquelle se trouve la base aérienne T4 (stratégique pour le ravitaillement iranien). L’objectif principal serait à terme la reprise de la ville de Deir ez-Zoor.

Comme nous le rappelions dans notre billet de mars dernier, la reprise des villes de Raqqa et Deir ez-Zor, et plus largement de tout l’est syrien sous domination de l’Etat islamique, est l’enjeu actuel de l’entente russo-américaine en Syrie. Il s’agit à la fois d’une entente et d’une concurrence dans la mesure où Russes comme Américains entendent, via leurs « proxies » respectifs, avancer leurs pions qui vont déterminer le sort de la future Syrie mais aussi celui de l’équilibre des rapports de force au Moyen-Orient dans son ensemble, avec les incidences énergétiques, sécuritaires et économiques considérables. Cette entente-concurrence a été comparée avec justesse par Elijah J. Magnier pour le journal koweïtien Al Rai (“The US-Russia race in Syria: towards a military confrontation?” disponible en anglais sur son blog) avec la course pour Berlin en 1945 entre les Alliés et l’URSS, course qui allait délimiter les zones d’influence future une fois l’Allemagne nazie anéantie. C’est également la première fois depuis 1945 que des troupes russes et américaines affrontent le même ennemi au sol.

La course pour l’Est syrien entre les forces gouvernementales et pro-gouvernementales (soutenues par la Russie et l’Iran) et les FDS et groupes « rebelles » (soutenus par les Etats-Unis et la Coalition) est en réalité le véritable enjeu de ces accords de cessez-le feu. Ainsi, les zones urbaines de Raqqa et Deir ez-Zor, ainsi que les passages d’Al-Tanf et Al Boukamal (respectivement Al Walid et Al Qaim pour les Irakiens) – situés le long de la frontière syro-irakienne – sont les quatre points que vont se disputer toutes les forces en présences dans un futur proche.

Situation militaire en Syrie au 11/05/2017. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles ; en jaune : les FDS ; en noir : l'EI. Les cercles bleus indiquent les zones stratégiques disputées pour le contrôle de l'Est syrien. SouthFront, modifiée.

Situation militaire en Syrie au 11/05/2017. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles ; en jaune : les FDS ; en noir : l’EI. Les cercles bleus indiquent les zones stratégiques disputées pour le contrôle de l’Est syrien. SouthFront, modifiée.

Nous l’avons vu la reprise de Raqqa est en bonne voie par les FDS, malgré les bombardements turcs.

Concernant Deir ez Zor, la ville est contrôlée majoritairement par l’EI qui en  a chassé le Front al-Nosra (ex Al-Qaida en Syrie) à l’été 2014, mais n’a pu reprendre deux zones restées aux forces gouvernementales et qui demeurent assiégées depuis, résistant grâce aux ravitaillements aériens en hommes et en matériels. Ces deux poches aux mains de Damas sont situées d’une part à l’ouest de la ville, autour d’une base de l’Armée syrienne, et d’autre part à l’est, autour de l’aéroport de la ville.

Situation militaire à Deir ez-Zor le 05/05/2017. En noir : l'Etat islamique ; en rouge : les forces gouvernementales ; en bleu : les avancées des forces gouvernementales ; en violet : les zones de combat. Les deux poches ont depuis fait jonction.

Situation militaire à Deir ez-Zor le 05/05/2017. En noir : l’Etat islamique ; en rouge : les forces gouvernementales ; en bleu : les avancées des forces gouvernementales ; en violet : les zones de combat. Les deux poches ont depuis fait jonction.

Ces derniers jours, Russes et Syriens concentrent leurs frappes sur la ville tenue par l’EI. La Garde républicaine syrienne a été déployée dans les zones assiégées, tandis que les Tiger Forces ont été redéployées depuis Hama et Alep vers l’ouest de Palmyre. Le déploiement de ces deux unités d’élites de l’armée syrienne indique qu’une large offensive pourrait être en préparation prochainement depuis Palmyre via la route « Homs – Deir ez-Zor » reliant les deux villes à travers le désert syrien. La ville pourrait donc retourner dans le giron de l’Etat Syrien, lui permettant de couper en deux le territoire encore sous contrôle de l’EI et de l’encercler au nord .

Lutte pour le contrôle de la frontière syro-irakienne et l’avenir de l’arc chiite

Mais, au delà de ces manoeuvres tactiques d’ampleur, le véritable enjeu de cette course à l’est est celui du contrôle des frontières syro-jordanienne et syro-irakienne, et à terme, celui de la continuité ou non du fameux « arc chiite ».

Au début de cet article nous mentionnons le fait qu’une importante zone rebelle au sud-est de la Syrie est exclue du mémorandum signé à Astana. Longeant la frontière syro-iakienne, cette zone est sous le contrôle de la seule frange de l’ASL qui soit à dominante séculière dans toute la Syrie. Les rebelles de cette zone sont soutenus par la Jordanie et les Etats-Unis. Le principal point stratégique est le passage d’Al-Tanf à la frontière syro-irakienne, une des trois routes officielles reliant la Syrie à l’Irak servant de base aux rebelles entraînés par les Etats-Unis. Les forces spéciales US n’avaient d’ailleurs pas hésité à apporter leur soutien au Jaysh Ossoud al-Charkiya pour contrer plusieurs offensives de l’EI visant à reprendre ce lieu. Une avancée significative a été faite fin-avril début-mai dans cette région par les rebelles.

Situations militaires en Syrie au 27/04 et 11/05/2017. On voit distinctement l'important gain territorial rebelle le long de la frontière syro-irakienne (cliquez pour agrandir).Situations militaires en Syrie au 27/04 et 11/05/2017. On voit distinctement l'important gain territorial rebelle le long de la frontière syro-irakienne (cliquez pour agrandir).

Situations militaires en Syrie au 27/04 et 11/05/2017. On voit distinctement l’important gain territorial rebelle le long de la frontière syro-irakienne (cliquez pour agrandir).

Outre le fait de s’implanter dans le sud-est syrien en lieu et place de l’EI, l’objectif de cette avancée est de prendre le contrôle du passage d’Al Boukamal situé le long de l’Euphrate, au sud de Deir ez-Zor.

Ce regain d’activité expliquerait le renforcement de la présence militaire américaine en Jordanie. La branche média du Hezbollah présent en Syrie aurait géolocalisé, grâce à des drones, une base américaine utilisée par la Jordanie et les Etats-unis pour leurs opérations en Syrie, et constaté un renforcement significatif de leur nombre.

Carte de la base américaine supposée en Jordanie. En bleu : les zones contrôlées par les rebelles ; en rouge : les zones contrôlées par les forces gouvernementales (cliquez pour faire défiler).
Carte de la base américaine supposée en Jordanie. En bleu : les zones contrôlées par les rebelles ; en rouge : les zones contrôlées par les forces gouvernementales (cliquez pour faire défiler).
 
 

Carte de la base américaine supposée en Jordanie. En bleu : les zones contrôlées par les rebelles ; en rouge : les zones contrôlées par les forces gouvernementales (cliquez pour faire défiler).

Ces deux points pour le contrôle de la frontière syro-irakienne pourraient être le lieu d’affrontements futurs entre les forces gouvernementales et pro-gouvernementales et les « rebelles », une confrontation par proxies interposés pour Moscou et Washington. Il faudra également compter avec l’EI qui, avec la perte prochaine de Raqqa et Mossoul, joue désormais sa survie territoriale. De nombreux renforts ont d’ailleurs été récemment observés le long de l’Euphrate entre Al Boukamal et Deir ez-Zor.

Cartes des mouvements potentiels à venir pour le contrôle de l'Est syrien. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles ; en orange : les FDS ; en noir : l'EI ; en violet : les forces gouvernementales irakiennes. SouthFront, modifiée.

Cartes des mouvements potentiels à venir pour le contrôle de l’Est syrien. En rouge : les forces gouvernementales ; en vert : les rebelles ; en orange : les FDS ; en noir : l’EI ; en violet : les forces gouvernementales irakiennes. SouthFront, modifiée.

Selon Elijah J. Magnier (article cité), la récente activité « rebelle » sous supervision américaine dans le sud Syrien expliquerait également pourquoi Bagdad aurait également multiplié ses forts le long de la frontière irako-syrienne.

Toujours de même source, ce serait Faleh al-Fayad, Conseiller à la Sécurité nationale du gouvernement irakien, chef des Unités de mobilisation populaires, milices chiites irakiennes formées en 2014 pour combattre l’EI, qui aurait informé Damas et le Hezbollah des plans « suggérés » avec insistance par les Américains à Bagdad. C’est pourquoi la reprise rapide de Deir ez-Zor est un enjeu crucial pour l’avenir de la Syrie et de la région.

Au-delà de l’intégrité territoriale de la Syrie, c’est donc la continuité territoriale de « l’arc chiite » qui se joue actuellement. Si l’est syrien devait tomber aux mains des FDS et des groupuscules « rebelles » sunnites salafistes soutenus par les Américains, l’arc s’en trouverait brisé.

Conclusion

Les prochaines semaines vont être riches en rebondissements. Au-delà de certaines postures ou déclarations et en dépit de la persistance d’un courant idéologique radicalement opposé à toute amélioration de leur relation, Moscou et Washington font montre d’une volonté de s’entendre sur le terrain pour mettre un terme à cette guerre. C’est ce qu’atteste la visite de Sergueï Lavrov à Washington mercredi 10 mai, une première depuis 2013 pour le ministre russe des Affaires étrangères, au cours de laquelle ce dernier a pu s’entretenir avec son homologue Rex Tillerson et le président Donald Trump. Une telle rencontre montre bien que les frappes américaines du 7 avril dernier en Syrie n’ont pas constitué de rupture, s’agissant peut-être même d’un moyen pour le président américain de desserrer l’étreinte politique interne qui l’empêche toujours d’enclencher le reset voulu originellement dans la relation américano-russe. Ces frappes n’ont pas vraiment affecté le rapprochement tactique observé précédemment, même si la rivalité globale demeure évidemment vive ; rivalité dont les enjeux sont lourds et touchent l’équilibre des puissances et des influences sur un monde de plus en plus difficile à contrôler ou à inspirer.

Sur le théâtre syrien, ce sont néanmoins les puissances régionales qui risquent de faire déraper cette fragile entente. L’Iran voudra à coup sûr préserver cet  « axe chiite », tandis que les monarchies du Golfe feront tout pour qu’il soit brisé. Si Israël peut trouver son compte dans les zones de désescalade dans au sud de la Syrie et le redéploiement du Hezbollah sur un autre front, elle voit aussi d’un bon oeil l’avancé des rebelles dans le sud-est syrien pour briser l’arc chiite et l’influence iranienne dans la région. Quant à la Turquie d’Erdogan, vexée que ses intérêts soient parfois négligés au plan militaire ou politique, elle pourrait exercer, ici ou là la capacité de nuisance ou de paralysie de certains mouvements militaires. C’est ce qu’atteste la récente création du First Corps dans la zone rebelle pro-turc au nord de la Syrie. Il s’agit d’une coalition rebelle en vue de combattre le YPG, PKK. Tout cela risque de retarder d’autant la maturation d’une consensus politique viable qui puisse augurer pour le malheureux peuple syrien de la fin d’un trop long martyr.

Après les progrès enregistrés à Astana les négociations reprennent à Genève le 16 mai 2017

Pendant que des négociations sont conduites à Astana sur la création de zones de sécurité pour faire baisser la violente d’intensité  sur le terrain,les négociations de fond reprennent à Genève dans le cadre de l’ONU. Cette négociation à deux niveaux est un exemple de la collaboration entre La Russie, l’Iran et la Turquie, soutiens des différentes parties et les Nations-Unies. C’est une approche pragmatique qui pourrait, à terme, porter ses fruits, espérons-le. (AFS)

L’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie Staffan de Mistura à Genève, le 31 mars 2017 (afp)

Un nouveau cycle de négociations sur la Syrie doit commencer à Genève la semaine prochaine, ont annoncé lundi les Nations unies.
« L’envoyé spécial (de l’ONU pour la Syrie) Staffan de Mistura va à nouveau convoquer les négociations inter-syriennes sous les auspices des Nations unies à Genève le 16 mai 2017 », a fait savoir l’ONU dans un communiqué.
Cette annonce survient quelques jours après que les soutiens du gouvernement Syrien, la Russie et l’Iran, ainsi que la Turquie qui appuie les rebelles, aient signé un accord au Kazakhstan sur des « zones de désescalade » dans lesquelles gouvernement et opposition devraient accepter de cesser les hostilités.
M. de Mistura, qui a assisté en observateur aux négociations d’Astana, la capitale kazakhe, s’est félicité d’un accord constituant selon lui « un pas important, prometteur et positif dans la bonne direction ».
Lundi, ses services ont fait savoir qu’il espérait que l’accord d’Astana « serait pleinement mis en oeuvre, permettant ainsi une réduction significative des violences et concourant à l’établissement de conditions favorables aux négociations inter-syriennes à Genève ».
Les initiatives diplomatiques ne sont pas parvenues à ce jour à mettre un terme au conflit syrien, qui a fait plus de 320.000 morts et provoqué le déplacement de millions de personnes depuis qu’il a commencé en mars 2011 après des manifestations contre le gouvernement du Président Bachar al-Assad.
Jusqu’à présent, les négociations sous les auspices des Nations unies à Genève n’ont pas permis de produire de résultats concrets, malgré des progrès à l’occasion du dernier cycle en mars.
Conformément à ce que prévoyait la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU, les parties ont alors commencé à négocier sur quatre volets de discussion : la gouvernance (transition politique), une nouvelle Constitution, l’organisation d’élections et la lutte contre le terrorisme.
Mais les parties en conflit n’ont pas pu s’entendre sur la question du rôle du Président Bachar al-Assad pendant la période de transition.
Dans le cycle de négociations devant commencer la semaine prochaine, M. de Mistura « souhaite intensifier le travail (…) sur les questions se trouvant à l’ordre du jour des discussions, dans le (…) cadre des résolutions du Conseil de sécurité, en particulier de la résolution 2254 », a précisé le bureau de l’envoyé spécial de l’ONU lundi.
M. de Mistura informera le Conseil de sécurité de l’ONU sur les négociations « dans le courant du mois », a encore dit la même source. (AFP)

Six ans de guerre en Syrie: le miroir de nos échecs

 

Deux chercheurs de sensibilité opposée, Jean-Pierre Filiu et Frédéric Pichon publient chacun un livre clair et argumenté. Ces deux ouvrages permettent de mieux comprendre ce pays ravagé par la guerre civile. Et nos propres erreurs

Il y a six ans, le 15 mars 2011, le pouvoir syrien de Bachar al-Assad réprimait violemment des manifestations d’opposants. Le début d’une atroce guerre, toujours pas terminée.

Une seule chose réunit Jean-Pierre Filiu et Frédéric Pichon : leur amour de la Syrie. En revanche, sur la guerre civile qui s’y déploie depuis six ans, leurs désaccords d’historiens et d’arabisants sont profonds. C’est dire si la lecture parallèle de leurs deux livres permet, non de se faire une opinion moyenne et insipide, mais d’aller plus loin dans la compréhension d’une situation tragique, en évitant l’écueil des anathèmes et des polémiques.

Depuis le premier jour, Jean-Pierre Filiu soutient activement ceux qu’ils appellent les « révolutionnaires », c’est-à-dire l’opposition modérée, au risque de privilégier son engagement personnel à la froide réflexion. Au risque, lui, de passer pour un soutien du régime, Frédéric Pichon se méfie des amis syriens de Filiu, par crainte de l’islamisme et attachement aux chrétiens d’Orient. Et si le premier approuve la politique anti-Assad de la France, le second y voit un « naufrage de la diplomatie française ».

Jean-Pierre Filiu n’en est pas à son premier livre sur la Syrie. Son Je vous écris d’Alep (Denoël, 2013) était un témoignage à chaud de la situation sur le terrain. En 2015, l’universitaire publie une BD (avec Cyrille Pomès) intitulée La Dame de Damas (Futuropolis, 2015), une manière pour lui de raconter cette « révolution » à un autre public. Avec Le miroir de Damas, Jean-Pierre Filiu en revient à l’histoire. Il entreprend de nous convaincre que « nous avons tous en nous une part de Syrie ». Si son livre part d’un cri de colère contre « l’indifférence » de « notre monde [qui] a abandonné la Syrie et son peuple à une horreur inimaginable », il nous montre comment « Damas nous tend aujourd’hui son miroir », tant « la descente aux enfers de la Syrie et de son peuple n’est ni un problème d’Arabes, ni le solde de querelles immémoriales ». C’est une histoire partagée que Filiu nous raconte dans ce livre savant mais très accessible.

Chemin de Damas. Tout débute avec Saint Paul et sa conversion « sur le chemin de Damas » : « C’est en Syrie que le christianisme a commencé à s’émanciper du judaïsme » et, là aussi, qu’a « grandi une chrétienté consciente d’elle-même au point de nourrir une ambition universelle ». Suivrons « les schismes d’Orient », « le premier empire de l’Islam », « les croisades et Saladin », la terreur mongole, puis le retour des Européens avec « les échelles du Levant » ou « la trahison des Alliés » au lendemain de la Première Guerre mondiale. L’auteur rappelle que ce « pays de Cham » est, dans l’eschatologie islamique, « la terre de la fin des temps », des concepts médiévaux repris par Daech.

Jean-Pierre Filiu insiste sur les erreurs et les crimes commis par les Français durant la période du mandat (1920-1946). Cette histoire est peu connue dans notre pays et il faut, par exemple, lire l’Histoire des Arabes d’Eugène Rogan (Tempus) pour mesurer l’ampleur des dégâts. « Comment ne pas retrouver dans ce triste feuilleton mandataire les échos de la conflagration actuelle ? », s’interroge Filiu, fidèle à sa méthode de « concordance des temps ». C’est, selon l’auteur, le refus obstiné de comprendre qu’il s’agit d’une révolution et l’accent, excessif à ses yeux, mis sur le sort des « minorités ». « Ce discours n’a pas pris une ride depuis les propagandistes du mandat [français] jusqu’aux thuriféraires d’Assad », dit-il.

S’il n’est pas cité, Frédéric Pichon fait évidemment partie de ceux dont Jean-Pierre Filiu dénonce les thèses. Jeune spécialiste de géopolitique, auteur d’une thèse sur le village chrétien de Maaloula, Pichon considère que la Syrie est « une guerre pour rien ». Au vu de l’échec de la « révolution » déclenchée en mars 2011 et de la « résilience » du régime, il est difficile de lui donner tort. Il place son livre sous les auspices de George Orwell, qui écrivait à propos de la guerre d’Espagne : « J’ai vu l’histoire s’écrire non pas en fonction de ce qui s’était passé, mais en fonction de ce qui aurait dû se passer ».

Progressive paralysie. Pour Frédéric Pichon, « la guerre régionale qui se joue en Syrie est devenue le symptôme de l’agonie d’un ordre international en même temps que la prémisse de celui qui vient. » Il diagnostique « la progressive paralysie de l’Occident, entravé dans ses actes mais aussi ses mots, donnant la pénible impression d’un monde qui lui échappe ». Il insiste sur « la dimension religieuse de ce conflit que les acteurs, à tort ou à raison, envisagent comme un élément essentiel, tandis que ce phénomène structurant est de plus en plus inconcevable dans nos sociétés qui vivent le crépuscule du religieux ».

Moins historique que celui de Filiu, le livre de Pichon décrit la situation actuelle, après la chute d’Alep-Est, en décembre dernier. Il revient toutefois sur les fondamentaux géopolitiques, sur lesquels s’est construit le régime baasiste depuis les années soixante. « Le système est confronté à deux contradictions majeures : celle du nombre et de l’espace », écrit-il. « Issu d’une communauté minoritaire, les Alaouites, et gouvernant avec d’autres groupes minoritaires, y compris la bourgeoisie sunnite, l’État baasiste manque d’un socle suffisant. Il lui est donc nécessaire de négocier quand c’est possible et de frapper brutalement quand il le faut, c’est-à-dire la plupart du temps ».

Finalement, note-t-il, « la contestation est venue de la plus grosse partie des mécontents, les populations des petits bourgs ruraux et des campagnes, véritablement sacrifiés sur l’autel des réformes économiques et ce paradoxalement alors que le Baas avait fondé ses succès et son arrivée au pouvoir sur cette ruralité ». En 2011, « c’est la Syrie périphérique qui se soulève brutalement ». Une thèse qui séduirait sans doute le géographe français Christophe Guilluy et sa « France périphérique »…

« Les révolutionnaires qui se sont soulevés en 2011 étaient persuadés de la chute imminente du régime Assad et ce fut sans doute leur plus grave erreur », juge Jean-Pierre Filiu. Un constat qui s’apparente finalement au « sursaut d’intelligibilité » revendiqué par Frédéric Pichon.

Le miroir de Damas », de Jean-Pierre Filiu, La Découverte, mars 2017, 14 euros.

Syrie, une guerre pour rien, de Frédéric Pichon, les éditions du Cerf, mars 2017, 16 euros.

 

Syrie: fin des discussions de Genève avec un « agenda clair »

Staffan de Mistura, à Genève, le 3 mars 2017 (Afp)

Les discussions de Genève ont pris fin avec l’acceptation par les belligérants syriens d’un « agenda clair » incluant la gouvernance et la lutte contre le terrorisme, et l’ONU prévoit un nouveau rendez-vous en mars.

Après un peu plus d’une semaine de discussions difficiles, l’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a fait vendredi soir le bilan de ce quatrième round de négociations.PUBLICITÉ »Le train est prêt, il est en gare, les moteurs chauffent. Tout est prêt, il a juste besoin d’un accélérateur », a déclaré M. de Mistura.

« Je crois que nous avons à présent un agenda clair devant nous », a indiqué l’émissaire. « Nous avons discuté de procédure, mais nous avons aussi discuté de substance », a-t-il dit.

Ce diplomate chevronné, dont l’optimisme chronique bute depuis près de trois ans sur le du conflit syrien, a prévu de se rendre la semaine prochaine au Conseil de sécurité de l’ONU à New York.

Ensuite, a-t-il dit, « nous aurons Astana (…) pour consolider le cessez-le-feu, et puis à nouveau Genève », en mars.

La Russie, alliée de Damas, et la Turquie, soutien des rebelles, parrainent en effet depuis fin décembre un processus parallèle de négociation à Astana (Kazakhstan), centré sur les questions militaires.

Si huit jours de discussions à Genève n’ont pas permis d’avancée majeure, de tous petits pas ont été accomplis, et aucun des belligérants n’a pris le risque de claquer la porte.

Le médiateur de l’ONU a enchaîné les rendez-vous avec toutes les parties: la délégation du régime, celle du Haut comité des négociations (HCN, principale délégation de l’opposition), et les opposants proches de la Russie, le « Groupe du Caire » et le « Groupe de Moscou ».

Les pourparlers n’ont en effet pas permis d’entamer des discussions directes entre les belligérants. Les deux parties se sont simplement fait face lors de la cérémonie d’ouverture jeudi dernier, dans une ambiance polaire.

A l’issue des négociations, Bachar al-Jaafari, l’austère chef de la délégation du régime, a quitté l’ONU sans s’adresser aux médias, tandis que le chef des négociateurs de l’opposition syrienne, Nasr al-Hariri, a jugé cette session « plus positive ».

Terrorisme et transition politique

Les discussions ont essentiellement porté sur des questions d’agenda mais ont permis, pour la première fois, d’obtenir un « agenda clair » en quatre points, selon Staffan de Mistura.

Le gouvernement avait insisté à plusieurs reprises ces derniers jours sur sa volonté d’ajouter la lutte contre le terrorisme aux trois autres éléments prévus par l’émissaire avant le début des négociations, à savoir la gouvernance – thème flou pour évoquer une transition politique -, la Constitution, et les élections. Il a obtenu gain de cause.

Ces quatre sujets seront discutés « en parallèle », a assuré l’envoyé spécial, mais les questions de stratégie contre le terrorisme seront discutées à Genève tandis que la partie opérationnelle de la lutte contre le terrorisme sera abordée à Astana.

Pression russe

Les pourparlers de Genève visent à mettre fin à la guerre en Syrie, qui a fait plus de 310.000 morts et des millions de réfugiés alors que le conflit va entrer le 15 mars dans sa septième année.

Trois sessions de discussions en 2016 s’étaient soldées par un échec, en raison des violences sur le terrain et de l’insistance du régime à parler de terrorisme, quand l’opposition réclamait des discussions sur une transition politique.

Mais les positions se sont nuancées, sous l’influence de l’acteur majeur du dossier, Moscou. Présent à Genève pour le Conseil des droits de l’Homme, le ministre adjoint des Affaires étrangères russes, Guennadi Gatilov, a rencontré la délégation du régime, et, fait sans précédent, celle du HCN.

La Russie intervient militairement en Syrie depuis septembre 2015 et a permis au régime du président Bachar al-Assad de se renforcer sur le terrain. Elle tire aussi les ficelles sur le plan politique, en l’absence des Etats-Unis, dont le président Donald Trump n’a donné jusqu’à présent aucun signe d’implication dans la recherche d’un règlement du conflit syrien.

Et les pressions russes semblent avoir payé, puisque pour la première fois le régime a annoncé publiquement à Genève qu’il était prêt à discuter des trois thèmes politiques fixés par M. De Mistura.

La pression de Moscou s’est exercé aussi sur l’opposition. Jeudi, la porte-parole de la diplomatie russe a accusé le HCN de « saboter » le processus de Genève, intimant implicitement à l’opposition d’intégrer en son sein les représentants des groupes du Caire et de Moscou.

Quelle place pour la France dans le conflit syrien au lendemain de la chute d’ALEP?

Gérard Bapt, Président du Groupe d’Amitié France Syrie a eu l’obligeance de communiquer à l’Association d’Amitié France Syrie (AFS) une intéressante analyse du Centre d’Analyse, de Prévision et de Stratégie (CAPS) près le Ministère des Affaires étrangères pour tenter de répondre à la question: Quelle place pour la France dans le conflit syrien au lendemain de la chute d’ALEP?

Note du CAPS Affaires Etrangères du 3 janvier 2017

Nous nous permettons dans un soucis d’objectivité de dire d’ALEP-Est, ce qui n’est pas la même chose puisque la plus grande partie et la plus peuplée est à ALEP-Ouest.

L’Association d’Amitié France Syrie qui s’efforce de respecter son engagement de neutralité peut toutefois se caractériser par une analyse critique et équilibrée des positions exprimées par les différents groupes de réflexion sur la Syrie.

C’est la raison pour laquelle nous publions également une note de commentaires et en réponse de Fabrice Balanche à cette note du CAPS.

Fabrice Balanche-Les analyses désastreuses du CAPS sur la Syrie

Chacun pourra ainsi se faire sa propre opinion sur ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire.

En tout état de cause pour une Association comme la nôtre, qui a pour objet de développer par tous les moyens l’amitié entre la France et la Syrie, il nous apparaissait essentiel de mettre en perspective ces analyses stratégiques sachant qu’au delà des aspects de haute politique géostratégique, il faut rappeler au Gouvernement Français que la population syrienne continue à souffrir après 6 ans de guerre et qu’elle ne saurait, quelque que soit sa position pro ou anti régime, continuer à être l’otage des enjeux politiques internationaux ou régionaux. Il est du devoir éthique de la communauté internationale d’arrêter les sanctions envers la Syrie donc envers les syriens et nous pensons que Madame Mogherini la Haute Représentante de l’Union Européenne a raison de plaider pour lancer une aide importante de l’Europe pour la reconstruction de la Syrie ce qui passe par un rétablissement des relations diplomatique avec Damas.